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Partir

[Voila la republication (en texte et non plus en fichier à télécharger) de "Partir", la deuxième nouvelle de mon recueil Ascension.
Actuellement en correction. Il s'agit d'une version partiellement corrigée (j'ai malheureusement si peu de temps à y consacrer désormais).
Mes remerciements à M. Manutara pour ses précieux conseils techniques.
]

PARTIR


Chapitre I




Simplement parce qu'il n'en pouvait être autrement, se croyant déjà désabusé par une enfance qui avait coulé sans heurts ni misère, s'apprêtant à partir, il affichait un sourire ambivalent, à mi-chemin entre les larmes et un rire léger. Il ne savait pas s'il rentrerait. Il avait déjà beaucoup vu. Il avait voyagé. Il n'était pas sûr d'avoir appris.
C'était un homme jeune mais déjà presque marqué. Vêtu assez simplement, comme un fils d'artisan, il avait relevé son col haut et tenait son chapeau à la main. Il avait froid, à cause du vent marin qui lui mordait le visage. Ses yeux enfin se mouillèrent. Cette tiédeur lui fit du bien. Nous sommes le 20 janvier 17xx, se dit-il, tout commence ; j'ai tant à découvrir.

Sa soeur partie, Hugues avait lui aussi quitté ses parents. Il ne se sentait pas retenu à Strasbourg. Jusqu'alors son père lui avait payé des études dans un collège protestant où il côtoyait des jeunes gens de son âge qui lui offraient une image en réduction de la vie en société. Tous lui apparaissaient médiocres tant dans leurs caractères que dans leurs aspirations. Il ne s'était attaché à personne : pas d'amis, quelques ennemis, et encore... Ma vie n'est pas ici, se répétait-il parfois silencieusement. Seule sa soeur, lorsqu'elle vivait encore au logis familial, arrivait à lui faire retarder ses projets d'évasion de ce quotidien qui, assurément, ne pourrait jamais satisfaire ses aspirations. Tout comme lui, cette jeune créature parlait peu. Ses parents, persuadés que sa dévotion présumée ne pourrait trouver plus favorable séjour, l'avaient envoyée au couvent à l'âge de 14 ans. Ce jour fut pour Hugues une ouverture irrémédiable sur la réalité de sa vie, vie dans le meilleur des cas solitaire, sinon d'isolement.
Il n'appréciait guère que la compagnie épisodique des voyageurs de passage dans une taverne qu'il fréquentait lors de ses rares moments de sociabilité. Ces hommes lui racontaient volontiers leurs prouesses (d'une authenticité discutable) qu'ils commençaient eux-mêmes à prendre au sérieux après quelques chopes. Hugues ne pouvait alors, avec tout l'enthousiasme propre à la jeunesse, se défendre d'espérer partir un jour en mer vivre quelque chose de nouveau.

Les projets de Hugues remontaient à son enfance. A l'école déjà, il avait discuté avec ses camarades de leur avenir. L'un suivrait la voie tracée par son père et deviendrait artisan, un autre reprendrait la boutique, un troisième désirait continuer ses études afin d'accéder à "une haute profession de robe". Hugues, lui, voulait partir. A l'heure où le romantisme n'était pas encore né, il aurait néanmoins pu donner l'image d'un de ces jeunes échevelés aux ambitions héroïques, qui frôlent la mort pour s'adonner à l'amour, exclusivement, et déçus, en finissent avec leurs jours. En réalité, il n'était pas exactement ce type de personnage. Mourir en combattant, mourir d'amour et mourir d'ennui lui paraissaient des solutions de dernière extrémité qu'il préférait éviter. Il n'envisageait pas l'aventure avec la mort comme nécessaire fin. On le railla un peu après qu'il eut parlé ; enfin, que faisait-il à l'école et pourquoi n'être pas déjà parti, puisqu'il en avait tant envie ? Ils trouvaient ridicule un tel dessein, pour quelqu'un qui n'avait jamais vu la mer. Hugues savait bien pourquoi il était resté : sa soeur, la seule image de calme et de bienveillance, qualité si rare.

Dans sa chambre, Hugues assis à sa table, matérialise sa pensée, la main tremblante... Un minuscule barrot de quelques pouces entre deux doigts, voilà une pièce de plus à son dernier ouvrage, la reconstitution miniature d'une frégate.
Si l'on jette un coup d'oeil à ses étagères, on aperçoit déjà quatre bâtiments rangés sagement en ligne selon l'époque de fabrication. Parés de couleurs chatoyantes : rouge pourpre, cyan, vert pomme, blanc cassé... ils laissaient éclater de fierté leur coque bulbesque et, somme toute, priapique.
Conscient du temps nécessaire à pareil ouvrage de minutie, Hugues ne se risquait pas à les mouiller. Pour cet usage, le padre lui avait monté un modèle robuste et de conception rudimentaire, véritable dessin d'enfant (bien que dessin du père) en trois dimensions. Le garçon n'avait pas hésité à l'utiliser sur les canaux de la ville, le promenant en laisse comme n'importe quel canard domestique et il le faisait encore à dix-huit ans passés, avec cérémonie. Ce qui avait originellement été conçu à une fin ludique avait acquis en peu de temps le caractère d'une solennelle habitude jusqu'à jouer dans les derniers temps le rôle d'une sorte de medium entre le monde sensible et le monde de ses idées. Ainsi, par contemplation, sortait-il de lui pour abandonner la simple vue et apprenait-il à "voir en dehors" du bateau, métonymiquement devenu celui sur lequel il voyagerait un jour. Parfois, tout prenait des allures de prières à l'absolu sans qu'il en eût vraiment conscience. Jamais ses parents ne comprirent ses désirs lorsqu'il partait "jouer avec sa nef" (ainsi disait sa mère, une brave dévote).

Quelques années plus tard, Hugues, vingt-et-un ans, habillé de frais, enveloppé d'un épais manteau, se tenait dos à la fenêtre de la cuisine Devant lui, posé sur la table, son tricorne. La grossière pendule se rappelait aux esprits. Simple, sans fioritures, non cirée, assemblée de courtes planches de bois de sapin clouées sans prétention, elle ressemblait au couple assis devant le jeune homme. La mère, grasse, lasse, usée par la lessive et la cuisine, ce qui expliquait l'odeur de poireau qu'elle traînait avec elle dans toutes les pièces, se grattait sous son corsage jauni par intermittence, effet de l'attente. Sa coiffe blanche trop enfoncée sur son crâne lui donnait un air vergogneux, à moins qu'elle n'eût froid. Le père, assis lui aussi, les cheveux longs et grisonnants sortant en queues de son large chapeau, telles des feuilles de carotte. Plutôt maigre, l'homme était pourvu de larges mains et d'un gros nez ; les prunelles de ses petits yeux allaient de sa femelle à son rejeton sans se poser longtemps, en quasi-harmonie avec le battement de l'horloge.
Hugues regardait le mur, derrière ses parents, puis ces derniers, puis son chapeau, encore le mur, et s'y arrêta, attendant. La situation n'arrivait pas à être triste. Le père ne se montrait guère magnanime avec sa famille, et tout ce qui pouvait être thésaurisé l'était, "en attente d'un besoin éventuel", disait-il en alsacien. Bien qu'huguenot, il avait été enchanté de voir sa fille intégrer les ordres avec conviction et, ne s'étant jamais non plus senti très proche de son fils, un rêveur qui ne valait pas grand chose au travail, il avait accordé son aval à ses projets d'avenir.
La situation se voulait gaie, elle ne l'était pas davantage. Le père, homme de coeur, estimait que son fils parti, c'étaient quand même deux bras de mois. De plus, la mine des hommes avec lesquels il avait vu son fils s'entretenir ne lui inspirait pas confiance. Toutefois, il était trop tard pour revenir en arrière, il avait donné sa parole.
L'air doucereux, le père, la tête légèrement penchée de côté, commença à parler, hésitant entre chaque groupe de mots : "Tu sais... mon fils... tu vas bien nous manquer à la mère et à moi... ". Il semblait chercher des phrases de circonstance. Hugues, à ce moment, le considéra. Ses mains, restées immobiles et écartées vers l'extérieur comme celles d'un pasteur, s'étaient brusquement détendues et commençaient à s'agiter. L'homme mûr finit par trouver un équilibre entre ses pattes et ses mots, et reprit : "Vois-tu... en France... non, dans la province de France... enfin, tout n'est pas comme en Alsace. On voudra toujours te faire reculer dans ta culture... te prendre directement ou indirectement ton argent... Sois vigilant ! et n'oublie jamais que dans le danger, la meilleure solution est encore la fuite, la main à la bourse ! "
Après les recommandations de la mère, quelques larmes et quelques étreintes, Hugues finit bien par quitter la maison. Lorsqu'il disparut de l'horizon, la brave femme, filialement esseulée, lança, les yeux à la poutre de son plafond : "Si le Seigneur l'a voulu, ainsi en soit-il !".
Il faisait si beau ce jour-là.

Chapitre II




Quatre mois séparaient le départ de Strasbourg de l'instant présent. Hugues regardait autour de lui. Visiblement, il attendait.
Il attendit longtemps.
Enfin arriva un homme crasseux, débraillé : le jabot en corde, le manteau ? un sac troué ! une forte odeur de vinasse. Il accosta Hugues en titubant, l'oeil harengesque. Il était enfin temps d'y aller. Il lui signifia qu'il avait traversé tout le port à sa recherche. Hugues objecta que le rendez-vous avait été convenu à cet endroit précis. L'homme le fixa placidement, sans vibrer et, comme s'il vessait, lui souffla quelques injures bretonnes à la figure, puis il se tourna vers l'océan et lâcha un rot musical et parfumé. Voilà le bonhomme tout tracé, pensa Hugues. Le vieux le conduisit ensuite vers une antique goélette. Notre héros ne put réprimer un soupir, première inspiration face à ce poumon de voyage. "La Nicolette, c'est comme ça qu'on l'appelle, dis le vieux. Viens, je vais te confier au bosco". Quelques hommes d'équipage sont en train de charger la cargaison. La journée s'annonce fraîche et pluvieuse. Les planches de la passerelle grincent sans vraiment craquer. Hugues pense marcher sur du verre, il prend des précautions, par respect profond pour tout ce qui touche "à la personne du bateau". Il commence à regarder autour de lui. Les hommes sont très musclés, ils soulèvent de lourdes charges. Ils n'ont pas l'air de perdre leur temps en rêveries stériles, pas tant que tout n'est pas embarqué. A l'instant où son pied touche le pont, il croit, non chanceler, mais grandir, il se sent forcir, il prend, aussi curieux que cela puisse paraître, conscience de son âge, qui lui semble bien loin d'être celui d'un enfant. Le vieux accoste un jeune mousse de douze ou treize ans, qui leur indique un coin du navire où l'on aperçoit un homme maigre, qui semble un étranger, peut-être un Turc ? qui fait de grands gestes de ses bras glabres. En approchant, ils commencent à distinguer un homme de taille moyenne particulièrement large de carrure et très musclé. Ses bottes sont luisantes. Sa chemise s'ouvre à mi-poitrine sur un buste qui impose le respect de la force. Sa mâchoire, large et solidement encastrée dans une tête solide. Il passe plusieurs fois sa grosse langue sur des lèvres fortes. Il a de petits yeux buttés et un nez un peu épaté. Ses cheveux sont rares sur le dessus du crâne, mais longs et ondulés dans le cou. Il tient à la main une feuille de papier maculée et couverte d'écriture en colonne. En levant un peu le bras, sa cape s'est soulevée et découvre un fouet pendu à son ceinturon de gros cuir gras. En le voyant arriver, le moricaud les pointe du doigt le bras tendu et jette de longues phrases avec rapidité. Hugues n'entend rien à ce baragouin : il ne sait qu'un peu d'allemand et de latin.
Le bosco répond par un son rauque guttural et se tourne pour faire face aux nouveaux venus. "Excusez-moi, je réglais quelques problèmes avec cet ouvrier. C'est vous l'apprenti mousse qu'on m'envoie ?
— Oui monsieur, répond rapidement Hugues, visiblement tout excité. J'ai là une recommandation de Monsieur...
— Donnez-la moi ! " coupa net le bosco. Il la prit et la glissa sous sa cape sans la lire."Je tiens à vous prévenir tout de suite, vous vous appelez...
— LARCET, Hugues de mon prénom, monsieur.
— C'est ça, LARCET... Je tiens à vous prévenir tout de suite : ce bâtiment est une goélette de la marine marchande et non un bateau de pirates. Je suis tenu de par mes attributions d'y faire régner la discipline. Vous vous en rendrez compte très vite. Les hommes vous apprendront toutes les règles. Les trois principales sont : ne jamais piller ou consommer les marchandises que nous transportons, seul le cuisinier et ses assistants sont autorisés de par leur fonction à puiser dans la réserve. Vous êtes là pour charger les sacs, pas pour les ouvrir. Deuxième règle : ceci n'est pas un navire de transport de voyageurs, donc pas question de chômer ; vous aurez toujours quelque chose à faire. Enfin, votre contrat vous lie à nous pour toute la durée du voyage aller et retour, bien sûr ; par conséquent, toute escapade avant le retour ou pendant les escales serait considérée comme une désertion dans le langage militaire et serait puni de façon exemplaire. J'espère que vous serez raisonnable et qu'avec l'équipage tout fonctionnera dans l'ordre. Est-ce clair ?
— Très clair, monsieur.
— Bien, venons en aux petits avantages de votre travail chez nous. La solde est de xxxx F pour toute la durée de votre contrat. Si vous souhaitez par la suite vous établir dans la marine marchande, sachez que vous gravirez les échelons en fonction de deux critères : l'ancienneté et le mérite".
L'homme massif, après deux ou trois phrases purement pratiques, le laisse avec le vieux. Comme il n'est plus question de chômer, les deux hommes se dirigent vers le dortoir pour déposer leurs bagages. En entrant, ils furent saisis par l'odeur de vinaigre et de céréales. En balayant l'espace de leur regard, ils virent des sacs de blé et des tonneaux de mauvais piot. Hugues s'avança et chercha un coin au milieu des hamacs et des sacs qui tapissaient le sol. Il s'établit dans un coin et se changea rapidement pour commencer tantôt à travailler, car il était tout à fait conscient qu'avec un tel bosco, un peu de zèle ne serait sûrement pas malvenu. Quand il fut prêt, il chercha le vieux, mais sans succès : il a dû, se dit-il, trouver une place pour déposer son bardas. Une fois sur le pont, il fut incontinent mis au courant du travail de manoeuvre. Pendant quatre heures de suite, il garnit la cale de sacs et de caisses. Le travail favorisant les rapports humains, il perdit vite son anonymat mais les discussions furent remises à plus tard. Trop de travail.
L'équipage devait consister en une trentaine d'hommes, dont une grande partie travaillait sur le bateau depuis leur jeunesse. C'étaient des corps musclés, des torses poilus couverts de chiffons noircis qui avaient dû être blancs. Des brutes aux faces burinées, particulièrement près des yeux, comme c'est souvent le cas chez les marins que dardent les rayons du soleil reflétés par la mer. Une quinzaine de jeunes, dont un ou deux d'allure humble, et en majeure partie très laids. Malgré le frimas abrutissant, les hommes travaillaient laborieusement sous l'oeil insensible du maître d'oeuvre, et la transpiration, injuste paye de leur effort, les rafraîchissait regrettablement. Hugues vit un vieux qui soufflait comme un veau pour soulever une caissette. Il l'aida et le vieux — un maigre personnage à l'odeur de tabac très prononcée — le remercia en marmonnant avant de cracher une prise verdâtre qui lui avait coulé dans la gorge.
L'heure finit bien par tourner et les marins allèrent manger quelque croûte. Les matelots ne déjeunaient bien sûr ni avec le bosco, ni avec le médecin et le capitaine. Hugues fit explicitement la connaissance des hommes. Le cuisinier était un grand échalas sec comme un hareng et d'ailleurs, il en avait les yeux jaunes et inexpressifs. En voyant ses longues mains rouges — curieusement — et noueuses, Hugues sut tout de suite à qui il avait affaire. Il remarqua les groupes qui se formaient et parmi eux , deux ou trois hommes dont l'attitude et les propos laissaient augurer d'une conduite des plus détestables. Les pichets de vin furent promptement vidées, et les hommes allèrent s'étendre sur leurs hamacs sales, le niveau sonore commença parallèlement à diminuer et l'un des hommes, un trentenaire dégarni drapé d'un rouge jauni et taché comme de droit, prit une guitare très sèche et commença à gratter quelques notes très sèches, elles aussi. "C'est l'Espagnol" lui dit en se penchant, un homme à la panse tombante. Le dit Espagnol se haussa et protesta qu'il était né en France, que son père était un vrai Français, mort à la guerre pour l'honneur de sa patrie, et qu'il en ferait autant si l'occasion se présentait. Quelques ricanements gras émanèrent du fond, puis, dès que l'Espagnol posa sa guitare, les conversations bêtes cessèrent et certains finirent par s'endormir, parce qu'après une matinée de dur labeur, on ne met pas son orgueil dans une veille inutile quand on a l'occasion de faire la sieste, surtout si l'on n'a rien à dire. Hugues préféra attendre, obsédé par l'idée heureuse que dans quelques heures le vaisseau lèverait l'ancre. Il regarda les poutres, au dessus de sa tête ; des ronflements retentissaient depuis déjà quelques minutes. Il ne sentait plus ses membres gourds, peu habitués à tant d'exercice. Et il dut bien finir par s'endormir, si l'on considère qu'il se réveilla.
Plouf ! "Ahhach ! mais !" Hugues, trempé, regarda éberlué autour de lui, on venait de lui vider un seau d'eau sur la tête. Déjà que le temps se distinguait par sa fraîcheur humide, il lui avait fallu être extirpé de son sac en sursaut. Les hommes, qui faisaient cercle autour de lui, éclatèrent d'un rire gras comme une tranche de lard. Son vieux s'avança, il sentait mauvais, et lui expliqua que c'était en quelque sorte la coutume de réveiller ainsi les jeunes matelots. Hugues sourit, content d'être accepté par l'équipage. Un fois sur le pont, on détacha les amarres, que l'on largua, et le bateau s'ébranla lentement, très lentement, puis, soulevé par cet élan de liberté qui faisait battre les coeurs des vieux voyageurs de l'eau avec la même excitation que les jeunes recrues, il s'arracha du port. L'atmosphère était du coup moins fraîche et l'humidité moins malsaine. Le fond gambergeatif de Hugues sentait s'ouvrir là un avenir d'évasion perpétuelle et de nouveauté auquel il n'avait cessé de rêver dans son enfance, oisive par comparaison. C'est sans grande morosité que Hugues vit s'éloigner le paysage terrestre qu'il ne cherchait pas à connaître. Ne compte alors que le présent, et l'avenir aussi ne peut qu'être bon.
La dure journée de travail entama peu l'émerveillement continuel du garçon qui apprenait plus en vingt-quatre heures qu'en un an à l'école ou dans le monde. Les termes techniques, fort nombreux, furent pour lui des vocables étrangers qu'il apprit avec la facilité d'une prédestination. Le labeur de bord entra encore plus vite : il fallait tirer des cordes (les hommes disaient « hâler sur des bouts »), monter le long d'un mât, courir d'un bout à l'autre du vaisseau et, régulièrement, "faire reluire le pont comme un cul de vierge", sous l'oeil sans humour du bosco. A la barre, le capitaine et son second, deux hommes dont les fonctions leur permettraient le port, sans risque, de l’habit, jetaient de temps à autre un regard plein de paternalisme à ces travailleurs dont ils ne connaissaient pas les noms.
Le repas du soir, bien que fort peu goûteux (du bœuf salé sans autre accompagnement), fut plutôt gai. Les hommes parlèrent longtemps. Les groupes se précisaient. Hugues faisait partie de la minorité de jeunes matelots pour qui c'était le premier voyage sur la Nicolette. Les vagues, bientôt, se firent bercement et la nuit, pour courte qu'elle fût, se fit douce. Hugues se coucha dans son sac comme dans un lit, à ceci près que malgré sa fatigue, il ne voulait pas dormir trop longtemps.
Il parvint à s'éveiller seul, avant son heure, par une aurore ventée qui promettait une journée des plus clémentes. Selon le principe des quarts, les hommes qui travaillaient la nuit se disposaient à éveiller leurs camarades. Certains se trouvaient assis, lorsqu'il ouvrit les yeux, tels des oiseaux de proie, les bras pendant sur leurs genoux, entre les cuisses, la tête tournée vers l'extérieur du bateau, une scintillance pourprée.
A l'aube, inspection générale en ordre par le bosco.
.............................. Silence................................................
Tout s'était bien passé. Ils reprirent le travail.

Chapitre III : Petit retour




Le Strasbourgeois, avant de se retrouver sur le vaisseau, avait traversé la France comme un pèlerin de jadis, le sac sur le dos et le bâton à la main. S'arrêtant dans les fermes qui jalonnaient le chemin entre les villes, il proposait ses services pour de basses besognes. Il s'était occupé de porcs, de lapins, avait taillé la vigne et repeint les murs. Parfois, quand la charité chrétienne apparaissait au coin d'un bois ou que ses économies, durement gagnées, le lui permettaient, il profitait de la charrette d'un paysan ou d'un marchand en voyage. Afin d'économiser ses souliers et ses bas, il s'était habitué à marcher pieds nus et prenait un certain plaisir à sentir l'humide duvet de l'herbe sur les bas-côtés. De même, lorsqu'il ne faisait ni trop chaud ni trop humide, il voyageait sans chapeau et plaçait celui-ci dans son sac. Sans le sou, il ne lui était guère aisé, de se loger sans travailler, aussi couchait-il souvent à la belle étoile entre deux fourrés ou sous une couette de feuilles mortes. Au début, la présence d'hôtes indésirables le gênait pour s'endormir, puis il s'y fit. La proximité d'un cours d'eau était fort profitable pour se laver et se désaltérer. Réservant son couteau pour des usages plus nobles (trancher un poisson ou couper son fromage les jours fastes), il ne prenait plus la peine de soigner sa coiffure. Le ruban marron qui nouait autrefois sa chevelure en un élégant catogan fut déposé au fond du sac dans l'attente de jours meilleurs. Ses cheveux tombaient longs et sales (car rappelons-le, il n'avait pas tous les jours l'occasion de les entretenir).

Un soir, sortant des sentiers battus et se dirigeant vers une clairière pour y passer la nuit, il fut accosté par des messieurs fort peu comme il faut. Dire que, comparés à eux, il semblait un seigneur aux pieds poudrés n'était pas exagéré. Lors l'aborda-t-on fort alertement et lui demanda-t-on si, par charité, il avait quelque obole à faire à de pauvres malheureux. Le plus loquace portait deux pistolets à la ceinture ; derrière lui, son frère-dans-l'amour avait ceint ses épaules d'un tromblon comme il aurait fait d'un joug. La destinée, qui la moitié du temps suit l'évidence, partit cette fois dans la voie inverse et fit s'étonner Hugues lui-même de répondre : "J'allais justement vous demander la même chose !
— Tu as de l'esprit, l'ami, mais fort peu à propos" lui répondit-on.
— J'ose ajouter, en insistant, reprit-il, et fort peu d'argent en vérité ! Voyez" Et il leur montra le contenu de sa bourse et de ses poches : un mouchoir, quelques croûtes de pain... Levant le nez, le chef lui intima de vider le contenu de son sac. Des vêtements. Qui ne les enchantèrent guère, non plus que les souliers trop mûrs. Les hommes étaient déçus : ils n'avaient aucune chance d'obtenir de lui quelque libéralité que ce fût. "Excusez-moi Messieurs, reprit le jeune homme, mais cela fait bien une bonne journée que je n'ai rien mangé et vous pourriez peut-être...
— Alors là, c'est trop fort, fit l'homme le poing sur la hanche, mais c'est ce que j'aime ! ". Il jeta pour la forme un coup d'oeil à se camarades puis repris, serrant les talons : "Sois le bienvenu, compagnon d'infortune". Ainsi firent-ils connaissance.
On devine que cette brave confrérie se chargea de parfaire l'éducation du jeune homme et lui permit de vivre désormais d'expédients plus heureux. Hugues rendit de bons services. Pour le remercier, on lui fournit des provisions pour deux jours. Et il partit. Plutôt content malgré tout. La saison améliorait son humeur. Dans le crissement de ses pieds sur le gravier du sol, au chant des insectes, il s'imagina sur un bateau assis à jouer du luth. Pourquoi du luth, et pourquoi lui ? Il n'avait jamais montré d'intérêt particulier pour la musique. Le pittoresque d'une telle image s'était imposé à sa jeune conception de l'esthétique existentiel. La pensée récurrente de son voyage maritime lui donnait une envie de poisson qu'il était bien en peine de satisfaire. Ayant traversé divers petits villages d'Ile-de-France où il rencontrait des gens dont l'hospitalité le surprit, puis fait quelques provisions, il finit par arriver à Paris. Il découvrit qu'un vagabond de plus ou de moins dans Paris ne se remarquait pas ; cependant il tint à faire honneur à la capitale de la France en reprenant une mise convenable. Il réussit à se faire indiquer le temple le plus proche où il demanda asile au pasteur.
M. Baptiste était charitable. Il l'accueillit. Il le nourrit, le logea et paya une lavandière. Par sa compagnie bienveillante, son savoir et ses silences, il apprit beaucoup au jeune voyageur. Hugues, en contrepartie de ces bons offices, dit beaucoup de prières et fit à son hôte de nombreuses lectures saintes. Il le quitta presque à regret au bout de trois pieuses semaines, le sac rempli de victuailles. Malgré la police des moeurs françaises, Paris lui imposait la société en grand, tout ce qu'il avait voulu fuir en quittant Strasbourg. Il reprit son périple avec la chance de bénéficier gratuitement du transport dans la charrette d'un marchand jusqu'à...
Le reste de son voyage fut de peu d'intérêt. Il chantonnait sur la route, toujours plus joyeux de se rapprocher de son premier but, la mer. Le deuxième était de se faire accepter sur un bateau .

Chapitre IV




Hugues arriva à La Rochelle par temps froid et humide. En ville, il marchait au milieu des gens comme en terre d'exil, la raison temporairement obscurcie. En quelques instants, il se retrouva brutalement devant la mer. Il n'osait croire en la réalité du paysage, en une telle vision. Le port, ses bateaux, au lieu de le remplir d'allégresse l'émurent aux larmes. Il sentait qu'il était arrivé au terme de son premier but et n'était plus celui qui avait quitté ses parents et cheminé si longtemps pour arriver ici. "Une partie de ma vie s'en est définitivement allée", songea-t-il en regardant s'élever une mouette dans un mouvement courbe et élégant. "Cet oiseau quitte le sol en quelques secondes pour survoler les eaux .Il m'aura fallu des semaines pour atteindre l'océan. J'aurai sans doute du mal à trouver tout de suite du travail. Il longea le port et parvint à une plage déserte dont la beauté égalait, malgré le temps inclément, ses plus belles représentations imaginaires. Dès qu'il avait atteint la ville, avait été pris à la tête par l'odeur habituelle du littoral. Croyant que c'était le résultat de quelque soulagement naturel, il s'était hâté mais les effluves demeuraient plus entêtantes à mesure qu'il se rapprochait de l'étendue désirée.
Face à l'eau, aux algues échouées sur le sable, qui l'amusèrent un moment, il comprit d'où provenait l'odeur et commença à s'y habiter à au point d'en éprouver du bien-être. Les effets curatifs de l'iode étaient à cette époque-là mal connus, surtout loin dans les terres comme en Alsace. Il s'assit dans le sable humide et y enfonça ses pieds nus avec le plus grand sérieux. Il frissonna, mais la joie qu'il commençait à accepter depuis qu'il avait surmonté l'odeur iodée le protégea de tout froid. "Allez", fit-il, et cachant son sac derrière un rocher, il retira ses culottes et sa veste et courut plus vite qu'il n'avait fait depuis son enfance, jusqu'à la limite terre-eau mobile. Le mouvement périodique continuel des vagues était comme le flux du sang dans son coeur. Peu à peu, le sable humide sous ses pas devint complètement mouillé. Ses pieds s'enfoncèrent et il attendit la première vague...

Il trouva dans une petite auberge une place dans les écuries pour une faible somme et termina la soirée à écouter discrètement les conversations des vrais marins. Ils étaient à cent lieues de valoir ceux qu'il avait rencontrés à Strasbourg, des héros à les en croire. Non, ceux-ci étaient beaucoup plus simples. Le thème récurrent de leurs propos était d'ordre économique : quantité de poisson péché, prix de vente, bouches à nourrir... Des pécheurs côtiers ! Où donc se trouvaient les voyageurs aventuriers ? En tout cas pas dans cette modeste auberge.
Sa première nuit fut des plus agréables. Il se leva tard.

Pendant une semaine, il n'eut de cesse de trouver une place sur un navire de transport de marchandises, de ceux qui effectuent de longs trajets, réservant ses matins qui s'étaient vite montrés peu fructueux en matière de rencontres, à des promenades sur la plage et à la baignade. Il ne s'en lassait pas, allant de découverte en émerveillement, comme un enfant. Tout le fascinait, du proche comme du lointain, mais ce dernier conservait à ses yeux un intérêt plus puissant. Hugues voulait connaître davantage. "Je n'ai rien vu !", disait-il chaque fois qu'il marchait sur le sable au lever du jour, le regard avidement accroché à la ligne horizontale par excellence. Chaque matin, à son réveil, conscient de sa situation géographique, il vouait l'Alsace à tous les diables et trouvait décidément la mentalité de ses compatriotes trop étroite. Pourquoi s'obstiner à habiter cette terre plate dont les seules hauteurs, les "ballons", lui semblaient bien médiocres, à ne pas sortir, ne serait-ce que pour voir de quoi le monde est fait ? " Les Alsaciens redoutent l'Intérieur " — c'est ainsi qu'ils appellent la France — " comme ils craignent les Allemands, plus voyageurs et curieux qu'eux ", pensait Hugues. A cet endroit du monde qui semble en être la limite — pourtant la côte est longue — il se sentait capable d'un retour critique sur son pays et sur les hommes. Il avait encore du mal à l'évaluer convenablement, s'estimant seulement trop lent. "Qu'ai-je fait pendant toutes ces années ?" râlait-il "Quel temps gâché en inutilités, toutes oubliées". Mais l'image de sa soeur bien aimée lui revenait et son coeur se voilait du chagrin de l'absence. "Déjà qu'au pays nous ne nous voyions plus depuis des mois, alors maintenant", il versa des larmes et, encore enfant, se recroquevilla sur lui-même, concentré sur son intérieur qu'il avait négligé. La pensée de cette absence l'engagea à se resituer dans le monde Il repensait à ses parents, qu'il prenait en pitié, malgré l'affection qu'il leur portait. Il lui semblait qu'ils l'avaient adopté ; comment autrement montrer autant de divergences sur les points essentiels de l'existence ? Son père habitait sur son lieu de travail. La fenêtre de l'atelier, comme toutes les autres d'ailleurs, donnait sur une rue fort passante mais étroite, de sorte que pour voir le ciel il fallait soit coller son visage contre la vitre, soit sortir dans la rue et lever le nez. "Comment dans ces conditions se faire une idée de l'infini ?" se disait-il. "Certes, il y a la campagne avec ses champs à perte de vue mais l'impression dégagée est l'ennui, profond s'il en est. Quelle exaltation entre deux vaches qui broutent ? Et personne ne s'en lasse ? Serais-je clairvoyant pour ainsi me distinguer de mes compatriotes ? Ma pauvre soeur ! Tu vis ton idéal dans une cellule de nonne, alors que je pars le chercher à des milliers de lieues, en plein air sur les océans, peut-être même au-delà".
Trouver une place sur un navire de transport ne fut pas aussi long qu'il l'avait craint jusqu'alors : Hugues rencontra un vieil homme qui se chargeait de recruter parmi les habitués des tavernes des bras pour des traversées de longue durée.

Chapitre V




Hugues, à la différence de ceux qu'il surnommait (en lui-même) "les indésirables", se délectait de la cuisine à bord. : poisson frais tous les jours. La venaison atlantique était au delà de toute comparaison avec la friture du Rhin ! Il faisait plaisir à voir lorsqu'il engouffrait goulûment les quelques morceaux qu'on daignait lui servir. La nature l'ayant peu pourvu en sociabilité, il ne portait pas grande attention à ses coéquipiers et ne remarqua donc pas que son enthousiasme, sa jeunesse et, malheureusement, sa personne, suscitaient des jalousies voire même de la convoitise. On sait les écarts auxquels la solitude où l'univers fermé des navires comme des prisons peut porter des individus qui autrement n'y auraient pas été sujets. Un soir, Hugues surprit un homme, âgé d'une quarantaine d'années, luisant de sueur, en train de vaquer à quelque compensation individuelle. Le jeune homme, qui ne trouvait aucun intérêt à rester là à regarder se hâta de regagner sa couchette. Il prit toutes les précautions possibles pour se rendre invisible, de façon à n'être pas dérangé dans son sommeil. Il connaissait peu l'homme frénétique et, désormais, résolu de s'en tenir le plus éloigné qu'il pourrait. Le lendemain, le labeur lui changea les idées et le transport du voyage sur l'infinité verte le reprit comme avant. Les oiseaux qui, le premier jour, survolaient le vaisseau en décrivant de larges spirales sonores, étaient loin, de même que les nuages pluvieux. Seule la brume de l'aube rappelait la terre. A mesure que la traversée avançait, le climat devenait plus doux, ce qui réjouissait l'équipage. Hugues remarquait que le bosco ne se plaignait pas de son travail, ce dont il se trouvait aise. Le capitaine semblait ne guère s'intéresser à la vie de l'équipage et avait tendance à déléguer à son second, un homme jeune et ferme qui ne s'en laissait pas imposer par l'équipage. Le médecin de bord, dont on discutait la compétence — des rumeurs circulaient qu'il n'avait pas "fini" sur un bateau par hasard — se révélait un sympathique passager. Il remarqua tout de suite en Hugues, de par sa conformation physique, un homme récemment arrivé dans la marine : mains, bras, mollets, le jeune homme n'était guère musculairement développé en regard de ses compagnons. Il vint un jour le voir et par curiosité, (vice de la nature bien excusable, disait-il en souriant), lui posa quelques questions auxquelles le jeune homme répondit aussi poliment et laconiquement que l'y poussait son instruction et le permettait la situation.
"Et vous vous nommez... ? — Hugues LARCET, monsieur." L'accent épais du moussaillon amusait particulièrement M. BOMBOEUF qui, en homme déjà fin naturellement et dont la fréquentation des cuisines des grandes maisons avait appris à la longue à louvoyer dans les discussions avec art mais non sans esprit, poussa plus avant le jeune homme dans la conversation alors que lui, justement, s'en retirait, du moins pour le moment. Il apprit quelques détails sur le voyage d'Hugues jusqu'à La Rochelle mais ne put rien obtenir d'autre, son jeune interlocuteur ayant tendance à se répéter, mais toujours avec la grâce du langage puisque le français était pour lui langue étrangère. Les deux hommes prirent l'habitude de se voir aux heures de vacance et M. BOMBOEUF commença à étendre leurs entretiens vers des lieux plus élevés. Il lui parla d'Arts, des sciences, de "théories", mot qu'il fallut expliquer à Hugues. Ce dernier montrait un esprit simple mais un solide bon sens à ces matières qu'il avait dédaignées durant son éducation terrestre, obnubilé par son rêve. Dès lors qu'il était sur un bateau, il pouvait réfléchir à d'autres choses. M. BOMBOEUF était fort épris de sciences et de ce qu'il appelait "la pensée neuve". "Connaissez-vous les oeuvres de M. de Voltaire, de M. Diderot et des Encyclopédistes ?" lui avait-il demandé lorsqu'Hugues l'avait assuré qu'il avait étudié le latin et l'allemand.
"Non"
— Et même pas Leibniz ? s'enquit-il en désespoir de cause.
— Non monsieur. Mais j'ai lu de grands passages de la Saine Bible, de Calvin et de Buber, monsieur.
— Protestant, avec ça... Eh bien, mon garçon, me voilà tombé à point nommé pour me charger de ton éducation !" Et c'est ainsi qu'il s'appliqua à détruire des années de "prévention" et les bons principes de M. BAPTISTE. Les mots "matière", "système", revenaient souvent sans sa bouche. "Vois, disait-il, un poisson. Tu crois peut-être qu'il est sorti comme ça de l'oeuf qu'un être transcendant aurait créé. Et à partir de quoi, je te le demande ? De rien ? Helvétius a montré rationnellement l'agencement de la matière en chaque être, en chaque chose. Ce poisson, qu'est-ce ? Un peu de matière : des atomes ajustés d'une manière que nous disons "judicieuse" mais qui n'est au départ qu'un fait du hasard de la nature et que l'Evolution a modifié en fonction des circonstances". De temps en temps, Hugues l'arrêtait et réclamait le sens d'un mot ou lui demandait de préciser une idée qui lui semblait obscure. Il n'émettait pas d'opinion et se concentrait sur ce qu'on lui disait pour le bien comprendre. Il admirait la dextérité avec laquelle son professeur, par un questionnement incisif, l'amenait à des conclusions apparemment irréfutables qui révoltaient ses convictions. "Donc, il n'est pas de substance qui porte le nom d'âme, tu en conviens ?
— C'est ainsi qu'il semble résulter de votre raisonnement..." Hugues quitta l'impression d'agacement que suscitait le personnage et prit même quelque plaisir à cette compagnie qui, pour la première fois de sa vie, stimulait son esprit. Certes, il ne partageait pas ses opinions et restait fidèle aux grands principes de la religion chrétienne, mais la diversité des points de vue, lorsqu'ils sont exposés calmement et avec méthode dans la convivialité, contribuait au bouillonnement des esprits.
Un soir après le repas, M. BOMBOEUF vint trouver Hugues sur le pont : "Viens un peu voir en bas..." Il l'entraîna devant la porte de la cale. Il lui fit signe de se pencher pour observer entre deux planches mal jointes... Dans un coin, faiblement éclairé par une lampe à huile qui pendait à une barrot, trois hommes semblaient célébrer un sabbat explicite. Deux d'entre eux, plus âgés, tenaient fermement par les bras un jeune homme farouche qui visiblement tentait de se défaire de cette étreinte ; il était entièrement nu. Ses aînés avaient retiré leurs culottes et se tenaient fiers, la nature sollicitant en eux quelque mouvement qu'ils allaient satisfaire sur la personne du jeune homme. "Monsieur, intervenons !" fit Hugues, outré. "Non pas, mon jeune ami, lui répondit le docteur. Si cela peut te rassurer, j'ai vu , avant que de te venir trouver, ces deux personnes remettre quelque argent à ce jeune écervelé. Ils étaient très clairs dans ce qu'ils lui demandaient et il a pris l'argent en souriant. Peut-être sa résistance fait-elle partie du contrat ?" Les deux hommes assouvirent leurs coupables plaisirs, ignorant qu'ils étaient observés ; Hugues après cela, instruit de certains mouvements inhabituels, résolut d'être plus méfiant que jamais à l'égard de tout l'équipage. Prévoyant que les hommes allaient sortir sur le pont, Hugues et son docteur se séparèrent rapidement et s'allèrent coucher. Hugues eut bien du mal à trouver le sommeil.

Chapitre VI




Hugues ne se lassait pas de son travail à bord. Le mouvement vertical oscillant du bateau sur les vagues lui donnait l'impression de venir toucher le ciel, en parfait accord avec l'immensité océane. Dans quelques jours, la Nicolette jetterait l'encre au large des colonies. Après les îles, ce serait le continent américain, côté sud. Hugues questionnait le médecin sur les paysages inconnus qu'ils allaient découvrir. Ce dernier, très calme, lui expliquait tout en termes simples et exacts mais avait la fâcheuse tendance à tout rapporter à l'économie et au commerce. Le jeune homme préférait les cours de botanique : les plantes merveilleuses de telle ou telle forme, aux couleurs chatoyantes, dont certaines, paraît-il étaient carnivores. "Mangent-elles aussi les voyageurs étrangers ?" demanda-t-il une fois. Tout l'équipage avait fini par remarquer l'amitié du docteur pour le mousse, ce qui lui attira la méfiance ou l'hostilité, et globalement une certaine mise à l'écart.
Un soir, les hommes, pris de vin, le voulurent battre. Averti par le bruit, le bosco arriva au pas de course et rétablit l'ordre. Hugues s'en tira de justesse et remercia son sauveur qui prêta tout juste attention à ses paroles. Il eut pu le punir lui aussi arbitrairement, c'est chose courante sur les navires, pour apaiser tout le monde mais il savait que le médecin de bord lui portait de l'intérêt et il ne s'avisa pas de le réprimander ; au reste il n'avait aucune raison de le faire. Le docteur Bombeuf jouissait d'un bon crédit auprès du capitaine, dont il était devenu l'ami.
Depuis le début du voyage, il y avait eu trois punitions. Elles étaient toujours "exemplaires" : le fautif était attaché au grand mat puis fouetté selon un barème qui établissait le nombre de coups proportionnellement à la faute commise. Tous les membres de l'équipage étaient tenus d'y assister. Le capitaine, devant tant de chair rougie par le cuir brûlant, détournait la tête et scrutait, sourcils défaits, l'horizon inaccessible. Hugues le regardait parfois et pensait qu'ils avaient en commun une nature solitaire qui rejetait au loin les turpitudes de la vie terrestre. Mais celles-ci revenaient toujours.

A mesure que la destination se rapprochait, Hugues sentait se soulever en lui des battements de sang ; des bouffées lui venaient. Il s'activait au travail. Sans quitter de vue la mouvante infinité liquide qui environnait la Nicolette, si rapide et si fermée de l'intérieur.
L'atmosphère à bord commençait à se tendre. Hugues subit des brimades verbales, des menaces. Il n'intervint pas pour ne pas aggraver son cas par des représailles.

L'arrivée au large de *** fut comme un baume aux plaies des marins. La halte durerait une semaine.

Chapitre VII : Etapes




La goélette aborda par grande pluie les côtes de l'île ***. Des plages de sable fin, une lisière de forêt mystérieuse. "Nous voilà en terre sauvage" dit Hugues.
"— Aujourd'hui territoire français, ajouta avec enjouement M. BOMBOEUF, se figurant les plaisirs qu'il allait trouver en pareil site. Le bateau mouilla dans le port de ***. Hugues fut surpris et déçu de retrouver ce qu'il avait cherché à quitter. La ville n'était pas très grande mais ses bâtiments se dressaient avec suffisamment de fierté pour affirmer la présence européenne en ces terres jadis sauvages. Néanmoins, les colons semblaient avoir perdu un peu de police de nos moeurs civilisées et affichaient aux yeux du Strasbourgeois une nonchalance qui ne seyait guère qu'à des matelots ou des paysans. La chaloupe de reconnaissance revenait avec à son bord l'officier chargé de la surveillance du port, un bedonnant quinquagénaire qui, pieds nus, avait enfilé ses chausses en hâte et dont le torse nu ruisselait sous sa vareuse aux couleurs délavées, qui ne devait guère souvent lui servir.
C'est curieux, pensa Hugues en posant le pied sur cette terre nouvelle et regardant les colons déambuler dans la ville, les gens d'ici semblent vivre au ralenti. La pluie cessa et fut de suite remplacée par un soleil d'été. Les corps des matelots en train de sécher fumaient. Le déchargement des caisses, travail très dur, se fit en quelques heures. Quand tout fut accompli, Hugues fut hélé par le médecin : "Viens donc boire un verre avec moi à la taverne la plus proche, je t'invite. Je ne peux malheureusement toujours pas te convier à souper, je suis tenu d'y aller comme d'habitude avec le capitaine et ses ouailles..." La "ville" était si petite qu'à peine y entrait-on que déjà on en sortait. Tout était raccourci. Les maisons. Pas plus de deux étages. Un. Deux ?... Buvette. Hop ! Causette ! Glup. "Sortons". pliff ! Ça soulage. Retour au bateau. Hugues avait choisi de dormir à bord plutôt que de tenter sa chance en ville. Sa complexion le prédisposant peu au rut, il se moquait bien d'aller voir les filles. Il passa donc la nuit dans la cale ; quelques marins à la bourse allégée en faisaient autant.
Sur son frais hamac qu'il avait fait à la trace de son corps, très à son aise, il repensait à la traversée qu'il avait désormais derrière lui. De bons et grands souvenirs, assurément, mais seulement cela. L'évaluation d'une expérience nécessite du temps; Hugues manquait de recul et, somme toute, considérait le passé avec pessimisme. Homme de l'avenir, ou tourné vers celui-ci, il n'avait malheureusement pas une vision de très longue portée. Que pouvait donc faire en ce moment M. Bomboeuf ?, se demandait-il. Etait-il dans sa chambre à lire ou s'était-il assoupi dans le lit métallique d'une auberge aux côtés de quelque négresse publique ? La solution n'avait que fort peu d'importance. Hugues sourit, le visage de son maître se présentait à lui. Pendant ces quelques jours à terre, qu'allait-il bien pouvoir lui faire découvrir ? Il regarda autour de lui : plus de rats. Ils profitaient eux aussi des délices du séjour tropical. Avant de s'endormir, Hugues eut une pensée pour sa soeur bénédictine. J'aurais tant aimé te dire au revoir avant mon départ, faisait-il en lui-même, sentant son courage mollir et s'installer en lui un ennui de la vie. Ah oui, ça promettait nos belles colonies : toute la médiocrité urbaine fatiguée et grossière, piquée des moustiques ! Mais qu'avait-il cherché ? Il s'endormit, les larmes aux yeux et la gorge serrée.
Le soleil s'était levé depuis longtemps lorsque le jeune homme posa un pied froid et humide sur le plancher chaud. Les ondulations thermiques lui remontaient le long des mollets, sensation des plus agréables mais qui signifiait qu'il se réveillait trop tard. Les hommes avaient déjà mangé, il dut se contenter du réconfort que représentait l'idée du repas futur. Cela lui rappela les nombreux jeûnes imposés par sa longue marche vers l'ouest. L'idée ne lui était pas désagréable.
Sur le pont, il retrouva le médecin qui l'attendait, les mains dans les poches de sa vareuse déboutonnée. Content de voir son jeune ami, M. Bomboeuf dit : "Aujourd'hui, et ce jusqu'au chargement pour le départ vers notre prochaine escale, nous avons quartier libre. Il ne sert à rien de rester sur ce bateau au repos, alors que ce séjour délicieux ne demande qu'à nous révéler ses beautés". Ils descendirent à terre. Devisant gaiement, ils traversèrent la ville et la quittèrent vite pour s'enfoncer dans la forêt. Ce fut l'occasion d'un cours de botanique enfin pratique. Des animaux étranges émerveillaient le jeune voyageur et réjouissaient le naturaliste. "Stupéfiant, disait-il, voici une espèce de xxxx qui m'était inconnue. Je gage que la faculté des Sciences de Paris donnerait cher pour en posséder un spécimen". Il ne manquait pas de faire des croquis. Il procédait aussi à des prélèvements. Les plantes prenaient place dans sa gibecière qu'il portait en bandoulière alors que les insectes étaient enfermés dans de petites boîtes de diverses tailles, en bois ou en bambou, fermées aux extrémités par des bouchons de liège solidement ficelés et collés avec de la résine. La cueillette s'était avérée fructueuse ; M. le médecin botaniste, était brillant et Hugues, ravi, apprenait. "Avec toutes vos connaissances, Monsieur, disait-il, vous ne vous sentez jamais embarrassé ?
— Au contraire, mon jeune ami, faisait-il avec un sourire, le propre des connaissances, c'est qu'on n'en a jamais assez, quel que soit le domaine sur lequel s'est porté notre intérêt - pour ma part, c'est la philosophie métaphysique et naturelle et, à mes moments perdus à terre, la physique, même si parfois, je l'avoue sans honte devant toi, certaines de ses subtilités m'échappent." Ils marchaient, rejoignirent un chemin qui longeait les plantations dans lesquelles des esclaves étaient pliés en deux, en pleine besogne. "Vois-tu, dans la vie, pour être en paix avec soi-même mieux vaut chercher à tout savoir, ou carrément ne rien chercher à saisir, mais pas, alors ça non, faire étalage d'un "vernis" de ce que les gens des salons appellent "de l'éducation"...
— Je n'avais jamais vu de nègres", fit Hugues, comme s'il n'avait prêté aucune attention à ce que venait de lui dire son interlocuteur. "
— Et qu'en penses-tu, alors ? Ils sont plutôt robustes. Et beaucoup plus travailleurs , paraît-il, que la nation autochtone qui, avant notre venue, vivait dans l'état de nature. Mais ... t'ai-je déjà expliqué ce qu'était cet état ?
— Pas exactement, vous y faisiez parfois allusion, mais c'était tout.
— C'est l'occasion d'en parler, dans ce cas". Et il entreprit un exposé simplifié et peut-être un peu confus, citant les noms d'illustres contemporains que le jeune homme avait un peu appris à connaître avec lui. "Rousseau, vois-tu est allé plus avant que Hobbes..." Hugues écoutait, émerveillé, ce puits de science, tout en promenant un regard mou et comme indifférent sur ces corps en plein effort. Au bout d'un moment, M. Bombeuf s'étant arrêté : "Croyez-vous, Monsieur, que ce fut une bonne chose de les avoir tiré de leur ignorance naturelle ? — Il n'y a pas si longtemps, je le pensais fermement. Mais aujourd'hui, je suis plus réservé. Que leur avons-nous apporté ?" Un esclave venait de tomber de fatigue sur les genoux et le patron, la chair brunie par le soleil, ses cheveux blonds plaqués par la sueur, de son fouet lui administra le ferme conseil de se lever et de retourner au labeur. "Du travail qui leur gâche la vie, reprit-il, nos denrées qu'ils ne peuvent pas se payer, donc des besoins qu'ils ne sauraient satisfaire, nos vices et nos maladies. Ils avaient déjà bien assez des leurs. Et, comble de tout, cette infâme engeance qu'est la religion, plus barbare que toutes les guerres qu'ils pourront jamais faire". L'image du père Baptiste s'imposa à Hugues qui n'avait aucune antipathie pour cette instance. Toutefois, le médecin naturaliste commençait à jeter quelques ombres. Le plus troublant pour le jeune homme est qu'il lui fournissait de nombreux exemples. Insensiblement leur marche les entraîna loin dans les terres. Ils découvrirent des paysages qui les émerveillèrent. Chacun avait sa propre vision du site : pour le médecin, tout était fantaisie d'une nature foisonnante, bientôt maîtrisée, Hugues, au contraire, s'attachait à une perception esthétique du paysage, qu'il eut été bien en peine d'exprimer.
Ils s'assirent sur des rochers, la mer toute proche. "Quel endroit plaisant, n'est-ce pas, mon jeune ami ? — Certes, plus que l'Alsace, au point que je me demande pourquoi j'y suis né. Cependant, ces colons me déplaisent. Ils sont violents et semblent blasés et irritables. Dans un sens, ils sont un peu comme nous, les marins (je me considère comme tel), ils demeurent dans un périmètre restreint qui n'a plus guère de secret pour eux. C'est comme un village dont on sort rarement. C'est vrai qu'une île est plus grande que le plus grand des bateaux ; mais on doit finir par s'y ennuyer et, de là, des chicanes perpétuelles pour s'occuper..." Le soleil déclinait. Les deux parleurs se dirigèrent raisonnablement vers la ville pour ne pas être pris de vitesse par l'obscurité. Ils se séparèrent sur la promesse de se retrouver le lendemain, pour aller visiter cette fois un village retranché dans la forêt.
La semaine fort bien employée par tous et nombreux furent ceux qui quittèrent l'île à regret. Hugues sentait renaître l'appel du large, plus fort que toute pensée rationnelle. Les amarres larguées, il prit une forte inspiration et s'élança vers son poste. "J'aime l'infini", avait-il dit un jour à son médecin, curieux de connaître ses motivations. "C'est un peu comme nous tous... Et une fois qu'on y a goûté, c'est pour la vie". Les vagues cinglaient à nouveau la coque ovoïde sur laquelle la proue était collée comme par la vitesse, les bras en croix.
Une nuit, Hugues rêva qu'il s'accouplait avec la jeune femme de la proue devenue vivante. Son plaisir était grand et touchait à son comble quand brusquement le visage de Nicolette changea et laissa place à celui de sa soeur. A son réveil, on ne peut plus mal à l'aise, il alla faire un tour sur le pont. Il avait deux heures d'avance avant son tour de garde. S'accoudant au bord, il scruta l'étendue marron, calmée comme les dormeurs. Il en avait croisés deux, enlacés dans leur sac, innocentés par leur face bouffie de sommeil. Tirant un seau d'eau, il s'en aspergea le visage et les avant-bras, puis, simplement se retira à l'écart, tomba à genoux et joignit les mains.


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Commentaires

  • Bonjour,

    Merci pour vos sympathiques message et mise en lien. Votre site est intéressant, je vais le mettre en lien.
    Amicalement, à bientôt.

  • Merci d'être passé sur mon blog, je réponds à votre invitation : me voici ! Avez-vous trouvé un éditeur pour ces nouvelles ? Vivez-vous toute l'année au Japon ?

  • Bonjour, Fleur (quel joli nom).

    Pour l'éditeur, j'en chercherai un dès mon retour en France. Je suis au Japon jusqu'à août. Nous verrons bien. Bonne lecture et merci aussi à vous d'être passée.
    A bientôt.

  • Cher All-zebest je viens de lire votre nouvelle et elle m'a beaucoup plus . Comme vous semblez vouloir la faire publier , le marin et le passionné d'histoire maritime que je suis n'a pu s'empêcher de relever quelques inexactitudes d'ordre technique , je vous rassure!
    Ainsi un bateau qui a deux mats s'appelle une goelette.
    A l'époque où vous situez le récit , le dix-huitème siècle, ces voiliers mesuraient environ vingt mètres et embarquaient un équipage qui excédait rarement trente marins (vous parlez d'une centaine)
    Sur un voilier on ne tire pas sur des cordes mais on hâle sur des bouts
    Les relais se disent quarts
    Plutôt que de quartier maître on parlait alors de bosco pour désigner le chef d'équipage . De fait , comme vous l'avez bien compris , c'est lui qui faisait marcher le bateau!
    Les marins dormaient dans des hamacs ce qui occasionnait un important gain de place.
    Sur un navire en bois on ne parle pas de poutre mais de barrot.
    J'ai aussi relevé une petite inéxactitude dans l'ordre des escales . A l'époque les bateaux remontaient très mal au près . Pour traverser l'Atlantique , ils descendaient le long de le côte africaine où ils faisaient éventuellement escale puis , à la lattitude de îles du Cap Vert, ils obliquaient vers l'ouest en direction des Antilles pour profiter des allures portantes que leurs offraient les alizés d'est.Pour rentrer , ils remontaient suffisemment au Nord ( lattitude du cap Hatteras aux USA) pour attraper les puissants vents d'ouest qui les ramenaient au port (parfois pas)
    Vous parlez souvent de voiles . Sur ces voiliers , chaque voile avait son nom et était hissée dans un ordre bien précis . Grand voile , artimon , huniers , cacatois , focs...Dans les alizés ,aux allures portantes, on enverguait les phares carrés qui garantissaient une navigation rapise et paisible .
    Autre remarque: l'alimentation du bord . Elle était effroyable , composée essentellement de boeuf salé conservé dans des barriques et de biscuits marins . Fruits et légumes étaient inconnus d'où le scorbut!
    Le poisson frais était rare , car la pêche au large est très aléatoire !
    Enfin vous vous montrez bien indulgent pour le violeur de la fiancée du docteur Bonboeuf , un officier . Dans la dure réalité de cette époque , il aurait été pendu haut et court sans autre forme de procès , le capitaine détenant le droit de vie et de mort sur son équipage!
    Voilà quelques détails que je me permets de porter à votre connaissance . Vous allez dire , de quoi se mêle-t-il ? Encore une fois je me serais abstenu de tout commentaire si la plus grande partie de votre récit ne se déroulait en mer et si vous n'aviez l'intention de soumettre votre récit au verdict d'un éditeur .
    Amicalement

  • ENFIN !!! Cela faisait longtemps (des années !) que je rêvais de rencontrer quelqu'un comme vous qui puisse m'apporter les détails techniques qui me manquaient. Je vais donc retirer quelques temps la nouvelle de ce blog, afin de la corriger en suivant A LA LETTRE vos conseils. Si vous avez d'autres conseils (notamment le nom d'une plante exotique que j'avais laissé vide), s'il vous plaît, continuez à me les prodiguer. Merci de tout coeur.

  • La plante exotique par excellence aux Antilles était la très peu spectaculaire canne à sucre à l'origine du sinistre commerce triangulaire que pratiquait la majorité des armements de l'époque . Mais là si je commence , on sera encore là demain!
    Sinon comme arbres fruitiers il y avait les bananiers , les manguiers , les goyaviers , les caneliers , les poivriers , les papayers , le terrible mancenillier(pas sur de l'orthographe) dont le fruit ressemble à la pomme mais dont la consommation vous envoie ad patres dans d'horribles souffrances! Ses feuilles même ,au contact de la peau ,dégagent une substance acide qui occasionne de très douloureuses brûlures.
    Sinon comme plantes il y a les hibiscus , frangipaniers , oiseaux de paradis , jasmin , vanillers , orchidées...
    Il ne faut pas oublier diverses espèces de palmiers ainsi que l'inévitable cocotier!

  • Goyaviers,
    manguiers,
    morceaux de cannes à sucre,,
    caramboles au jus acide et arbre a pain,
    rien n'a échappé à mon appétit de poulpe...
    Avec les copains du quartier, et ce dès 8-9 ans, un de nos plaisirs était de se frayer un chemin dans la forêt, à l'arrière de nos maisons, et de grimper aux arbres pour non pas piller mais profiter de ses fruits.
    Les quelques bobos, éraflures ou les risques de chute étaient bien loin de nous arrêter, une mangue fraiche et juteuse a son prix.
    C'est tout de même rageant de ne pas se rappeler des noms de certains fruits parfois...

  • Apparté :

    Concernant ton texte qui est sous format "Justifié".

    J'ai pu voir que tu avais posé la question à un autre blogger !

    J'ai essayé de l'appliquer, sans y parvenir...

    Comment y es-tu parvenu ?

    Merci pour ta réponse

  • Concernant la "justification" : J'ai trouvé ! Après de courtes recherches sur google.
    Les indications du premier Blogger étaient plus que douteuses...

    Félicitation pour la qualité de tes textes que j'ai toujours plaisirs à découvrir.

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