Chaque année désormais (sauf erreur de ma part), a lieu à Lyon, dans le quartier Renaissance, au pied de la cathédrale Saint Jean, le marché des potiers. On appelle cela les Tupiniers. J'ai pris deux demi-journées pour le visiter, et j'y ai fait des trouvailles intéressantes, même si je n'ai rien acheté. Pourtant, l'artisan qui m'a le plus intéressé ne faisait pas partie de cette manifestation. Je connaissais déjà sa boutique, mais sans y être jamais entré. En vitrine, on y trouvait une ou deux calligraphie japonaise et une coréenne. Sis en plein coeur du Vieux Lyon, dans la rue la plus fréquentée par les touristes, c'est un local à l'ancienne, aux pierres apparentes. En entrant, on entend craquer sous ses souliers : ce sont les graviers qui recouvrent le sol. Le propriétaire est un personnage idéaliste, qui parle beaucoup et n'écoute guère, vous coupant d'un "C'est sûr ! ", "C'est pas la question !" ou encore "J'comprends bien, mais"... Il a à coeur de restituer l'âme du moment dans ses poteries, et considère ce type d'oeuvres comme un medium pour rapprocher les gens. Loin de souhaiter voir ses bols, ses jarres et ses assiettes dans des vitrines chez de riches particuliers ou dans des musées, il apprécie de les voir servir à un usage quotidien : boire du thé, par exemple, ce qu'il m'a proposé, avant de m'offrir sans façon de délicieuses prunes.
C'est aussi quelqu'un qui, bein que ne parlant pas de langue étrangère, apprécie de travailler avec des étrangers, notamment japonais et coréens, et ne s'étonne plus de retrouver des connaissances à lui dans un pays tiers où le hasar d'une collaboration artistique l'appelle. "La distance n'est jamais géographique, elle est dans la volonté de s'éloigner ou dans l'oubli", me dit-il en substance.
Alors que je ne lui avais pas dit grand chose, il m'offrit une de ses oeuvres alors que je n'avais rien acheté. Ce n'est que partie remise.
[La suite bientôt avec une ou deux photos.]