Je me suis porté volontaire pour participer au Salon de l'étudiant pendant une demi-journée. J'aidais à tenir le stand de la fac des langues.
J'ai vu tous les cas de figure : les polis, les mal polis, les moyen polis, ceux qui venaient avec leurs parents, d'autre avec un camarade, un(e) petit(e) ami(e), seul. Ceux dont c'étaient les parents qui parlaient, d'autres qui le faisaient comme des grands... Ceux dont les parents ne disaient ni bonjour, ni au revoir, ni merci...
Et quelques perles...
2006.01.19
Une famille arrive. Le fils fait deux mètres. Cheveux sales, habillé comme l'as de pique. Le père a une mine patibulaire. La mère parle :
"Mon fils prépare un bac S. et il voudrait faire des langues, de l'anglais.
- Oui.
- Il voudrait devenir professeur des écoles.
- Oui...
- Mais il ne veut pas avoir trop de livres à lire.
- Ah bon ?
- Il n'aime pas lire.
- Mais est-ce qu'il sait que la formation LLCE est une formation littéraire de haut niveau en anglais, et qu'on lui donnera pas mal de livres à lire en anglais ?
- Et en LEA ?
- Il y a du Droit et de la comptabilité, de la gestion...
- Mon fils refuse de faire de la gestion !
-Oui..."
Autre exemple : ceux qui veulent partir tous frais payés par l'Etat à l'étranger la première année sans avoir à faire leurs preuves, ou ceux qui s'imaginent qu'en anglais, ils n'auront pas de concurrence.
Mais mes pauvres enfants... S'il y a bien une section dans laquelle la concurrence fait rage, c'est l'anglais ! C'est la langue la plus étudiée. Elle ne bénéficie pas de l'avantage de la rareté comme le suédois ou le cantonnais...
J'ai été étonné de voir beaucoup de jeunes avec un bac S, qui ne montraient aucun intérêt pour la littérature ni la civilisation, les sciences humaines, venir pour s'inscrire en filière LLCE (la plus littéraire des deux filières "langues étrangères") en me prévenant qu'ils n'allaient pas changer. Beaucoup m'ont laissé entendre qu'ils n'étaient pas des foudres de guerre...
En gros, tous voulaient (si j'ai bien compris, mais il se peut que de nobles motivations m'aient échappées) : "rien fout' et êt' payé". Ils se préparent de terribles illusions. Même pour les enseignants, c'est parfois difficile, alors pour les jeunes exigents...
Vient le temps des statistiques : les langues qui m'ont été le plus demandées sont : 1/ l'anglais ; 2/ l'italien ; 3/ l'espagnol ; 4/ le russe, et seulement deux personnes étaient intéressées par le japonais, et le même nombre pour le chinois.
Croyez-moi ou pas, cher lecteur, mais je serais bien resté une demi-journée de plus. J'aime bien informer les gens, afin qu'ils s'engagent en connaissance de cause, qu'ils ne puissent pas dire : "Je ne savais pas !". Si on peut éviter les inscriptions-gaspillages, les futurs échecs scolaires (fort coûteux pour les parents qui sont loin de tous rouler sur l'or)... Je crois que c'est plus responsable que de présenter la Fac des langues comme un pays de cocagne où tout vous tombe tout cuit dans le bec, où tout vous est dû. Encore "hélas", il est fini, le temps où le baccalauréat vous permettait de trouver un emploi et d'en changer au gré de votre humeur. Aujourd'hui, notre pays forme, suprême raffinement, des docteurs chômeurs...