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Le sabre du grimpant (II)

[MC-Croche 8 est un homme très affairé. Il a tout de même pris le temps de rédiger la suite de sa nouvelle que je lui réclamais à corps et à cri.]


« La journée commence bien… » soupira Bottello qui, histoire de passer le temps autant que d’oublier cet incident bizarre, entreprit de relire une nouvelle fois le C.V de Pierre Etienne Ancelin, le seul qu’il eut sélectionné au terme d’une recherche éprouvante En effet, ça n’avait pas été une mince affaire que de découvrir enfin, parmi une masse énorme de candidatures dont la plupart étaient absurdes quand elles n’étaient pas burlesques, celle correspondant idéalement au profil recherché et cumulant les qualités multiples, et quelquefois contradictoires, exigées par un poste aussi discret qu’indispensable : secrétaire particulier d’un homme de lettres.

A la vérité, cela ne faisait guère plus d’une année que Raul Bottello s’était peu à peu convaincu de la nécessité d’être ainsi secondé dans ses activités littéraires… Auparavant, il avait tout assumé seul et ne devait qu’à lui-même son incroyable réussite ; toutefois, il ne pouvait maintenant se cacher davantage certains faits déplaisants : son inspiration piétinait, l’écran de son ordinateur restait trop souvent vierge et, pire que tout, la vente des ses deux derniers livres accusait un tassement inquiétant… Un apport de sang neuf devenait indispensable et c’est au choix judicieux d’un élément extérieur que s’en remettait Bottello pour réussir la transfusion.

Sur ce plan, il faut bien admettre que le dossier de Pierre Etienne Ancelin paraissait prometteur… Titulaire d’une maîtrise en littérature comparée, passionné, en outre, par la langue et la civilisation japonaise jusqu’à être bilingue autant qu’expert en arts martiaux, il possédait aussi l’avantage, décisif aux yeux de Bottello, de préparer une thèse monumentale sur son œuvre… Sa lettre de motivation, quoiqu’un brin exaltée, peut-être, dans sa formulation, supposait la promesse d’un dévouement aveugle à la cause du Maître et une admiration sans faille.

Sensible jusqu’à la dépendance à ces vapeurs d’encens, Bottello n’avait pas hésité trop longtemps pour choisir ce jeune homme à la fois si brillant et si bien renseigné, et c’était lui qu’il attendait dans les salons du « Royal Swiss Palace » avec une impatience grandissante.


Avant que d’assister à une rencontre qui devait s’avérer, pour l’un et l’autre, d’une importance capitale, il conviendrait sans doute de revenir un instant sur la carrière fulgurante et rien moins qu’orthodoxe d’un écrivain parvenu, en moins d’une dizaine d’années, à une popularité aussi complète que surprenante.

Comme l’avaient constaté de nombreux critiques, Raul Bottello était apparu tel une sorte d’« OVNI » dans le paysage littéraire mondial, et l’on est obligé d’avouer que rien dans son passé ne semblait le destiner à connaître pareille gloire.

Brésilien d’origine, il s ‘était, au terme d’une scolarité quelque peu « chaotique », essayé à des emplois divers…Dans le meilleur des cas, cela n’excédait guère six mois, soit qu’il y eut entre ses patrons et lui incompatibilité manifeste, soit le travail proposé se révélât trop en dessous de ses aspirations. C’est ainsi qu’on le vit successivement : « saute-ruisseau » dans l’étude du notaire Da Silva, vendeur-démonstrateur au sein d’une grande entreprise de sanitaire, et même joueur de maracas dans le petit orchestre de Joao Santos-Lopes, qui se produisait alors, sans trop de succès, dans les bars à touristes…


Le salut lui advint de façon très inattendue, alors qu’il terminait un stage au « courrier de Sao-Polo », feuille locale ou il était entré grâce à la protection d’un chef-typographe amateur de sambas.


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