Après "99 Rooms", je vais tenter de présenter "NFH Propaganda". D'une technologie et d'une interactivité similaire à son prédécesseur, NFH (sigle de "Not For Human") a choisi un angle plus cinématographique, ou plutôt narratif, et moins poétique. Ici, plus d'oiseaux, de trolls mélancoliques ou de plantes imaginaires. Tout commence avec un écran de présentation qui auparavant rappelait les films de zombies de George A. Romero. Des voix inquiétantes, démoniaques, semblaient nous appeler dans une langue indéterminée (l'anglais ?). Une nouvelle présentation nous met face à un placard métallique des plus inquiétants, variation encore plus personnelle que je trouve intelligente et claire d'accès. Si l'on choisit d'aller écouter les musiques (par MonsterX), on sera un peu déçu par le décor, très 2ème degré (à la "Ze craignos monsterz"), qui n'est pas vraiment dans le ton du reste du site, mais l'écoute vaut le détour. Je ne suis pas spécialiste de ce genre de musique (je demanderai à Zlu), mais il m'a semblé qu'elle avait le mérite de mettre déjà bien dans l'ambiance. Les bruitages, notamment les voix, sont également irréprochables. C'est du cisellement d'ambiance.
L'aspect visuel, présenté en français et en anglais avec une petite vidéo de la séance de prise de vues, est l'oeuvre du photographe professionnel William BELLE, artiste particulièrement doué, esthète, qui s'intéresse à la fois au nu et au bâtiment, de préférence d'architecture industrielle en ruine. Il a également fait des photos de bondage, activité complètement étrangère à mon univers mais force est de reconnaître que ces photos ne sont pas vulgaires et que l'esthétique est toujours présent, sans qu'on distingue une quelconque intention racoleuse. Nous avons affaire à de l'authentique photo d'Art.
En quoi consiste au juste ce projet "NFH" ? Comme dans "99 Rooms", il s'agit d'une promenade semi-interactive avec des éléments du décor sur lesquels cliquer, comme si l'on voulait se rapprocher ou toucher les objets, en somme. Contrairement à "99 Rooms", ici, le spectateur ne se sent ni invisible, ni en sécurité. Pour peu qu'il accepte de jouer le jeu, il entre dans le scénario et est interpellé par les personnages du lieu, fantômes et autres zombies. Car soyons clair, et on l'aura compris en voyant mes liens, "NFH Propaganda" est un site d'horreur, destiné autant à satisfaire esthétiquement l'amateur d'Art qu'à surprendre, faire peur ou tout simplement mettre mal à l'aise. C'est un site comprenant des scènes choc que je déconseille aux âmes sensibles, bien qu'il s'agisse toujours de fiction. Je ne cautionnerais jamais des photos de gens torturés en vrai. Que cela soit clair.
Oeuvre de fiction, oeuvre artistique, NFH Propaganda commence en affichant la couleur. La présentation, les musiques comme le texte de présentation nous font comprendre qu'on va avoir peur. Les auteurs l'expliquent simplement, mais clairement : "Nous travaillons sur nos angoisses les plus primaires, comme la peur du noir, des visions furtives, et quelques scènes gores...". Il s'agit bien d'"une propagande de terreur visuelle et sonore via le concept du labyrinthe et du site en lui même qui est en constante évolution" (courriel du webmestre).
Dès lors qu'on décide d'entrer dans le labyrinthe, on se retrouve devant une énorme porte métallique, très sale. C'est une deuxième chance de ne pas pousser plus loin. Un fois ouverte, l'aventure commence vraiment.
Personnellement, j'ai distingué deux niveaux : celui de l'usine, avec une longue scène dans le garage, où on trouve une vieille 2CV, et celui de la maison.
On ne peut pas dire que l'horreur monte en intensité : dès le début, on tombe sur une tête coupée et animée ! On passe d'une horreur à une autre avec d'habiles phases de transition qui permettent d'éviter l'effet du "trop c'est trop" qui disqualifierait le propos. Sans aller jusqu'à l'hyper réalisme, NFH reste toujours dans la vraisemblance, ce qui n'empêche pas le fantastique. Jeux sur les lumières, les couleurs, les angles de vue, certaines scènes font penser à des tableaux et rappellent les films de Dario Argento.
Au niveau du fond, c'est moins clair, mais comme je l'ai dit plus haut, davantage scénarisé que "99 Rooms". L'histoire est donc celle d'un visiteur un peu trop curieux, plutôt voyeur que réellement justicier, qui s'aventure dans une usine, puis dans la maison qui la jouxte, pour tenter d'en savoir toujours plus sur les événements qui s'y produisent. Il découvre des cadavres atrocement mutilés sur sa route, est menacé par des fantômes et finit par rencontrer quelques uns des auteurs de ces massacres en train d'oeuvrer "en direct". Parfois, comble de la perversité, il lui faudra pour passer dans la pièce suivante activer des mécanismes qui s'avèreront funestes à certaines victimes et feront de lui un tueur ! Les hurlements des victimes innocentes l'appelant à l'aide ne l'empêcheront pas d'actionner les interrupteurs... Tout cela par désir d'en savoir toujours plus ! Qui se livre à ces massacres ? Pourquoi ? Jusqu'où toute cette atrocité va-t-elle nous mener, si ce n'est à la folie ? Du début à la fin (du moins, jusqu'à l'écran qui nous dit "En construction"), on se sent observé, et on l'est plutôt deux fois qu'une ! Et pourtant, l'envie de progresser est forte, et on se laisse entraîner par ce démon de site sur la route de l'horreur.
Question technique, j'exprimerais quelques regrets minimes, d'abord comme je l'ai dit, concernant la page du sound test, qui n'est du point de vue visuel pas en phase avec l'aspect 1er degré du projet ; ensuite, les temps de chargements entre les niveaux, mais on s'y fait encore assez vite, et avec une bonne connexion, ça passe bien. Le plus gênant, me semble-t-il, était jusqu'à récemment l'impossibilité, contrairement à "99 Rooms", de reprendre notre aventure là où on l'avait laissée, ou tout simplement d'accéder à une scène particulière qu'on aime bien. Il fallait à chaque fois tout recommencer, ce qui était parfois dissuasif. C'était le principal défaut technique de ce site, que ses auteurs ont corrigé en instaurant un système de carte très bien conçu et facile d'accès, pour un grand confort.
J'invite donc l'internaute esthète et chevronné à aller faire un tour dans cette usine des atrocités. L'amateur de films de genre n'aura pas peur, et reconnaîtra des éléments clés de son univers favori. Les autres vivront une expérience pleine de malaise, mais aussi contempleront une beauté plastique maîtrisée. Si comme moi, vous aimez les usines désaffectées, le clair-obscur et les ambiances de lieux abandonnés, ce site est fait pour vous.
Commentaires
Voici un bon petit jeu :
http://www.big-boys.com/articles/dotmove.html
Allez jusqu'au 4 ème niveau (pas trop difficile) et vous comprendrez le lien avec ce post.