Raphaël regardait alternativement chaque visage autour de lui. Aucun ne semblait lui prêter la moindre attention. La douleur aux jambes était relancée, pulsive, obsédante ; elle lui semblait "sale". Il aurait eu le plus grand mal à la décrire exactement, et plus encore, ce qu'elle lui inspirait. Bien que normalement habillé, il se sentait encore nu, et frissonnait presque. Il ne pouvait s'ôter de la tête qu'il était peut-être en train de faire le mauvais choix. Sans doute aurait-il dû attendre sur la place que ces hommes vinssent le prendre et l'emmener il ne savait où. Malgré un vague sentiment d'inéluctabilité, il avait, somme toute, obéi à son instinct de conservation, sentant sa sécurité en danger. Avait-il eu raison ? Au final, qu'allait-il advenir de lui ? Il ne savait déjà pas pourquoi il en était arrivé là, alors quant à savoir comment il finirait, cela le dépassait complètement.
Plusieurs fois, il songea à descendre à tel ou tel arrêt, mais ne mit pas cette idée à exécution. Bien qu'il fût monté dans le premier bus qui s'était présenté, il ne laissait de penser que peut-être, parmi les passagers, il y en avait un qui était là pour lui, et qui se contentait d'attendre le moment propice pour sortir de son mutisme et de sa discrétion.
Le véhicule finit par s'immobiliser devant la gare de Lyon. Raphaël laissa sortir les passagers et descendit lentement, d'un pas raide (avec une douleur violente, un éclair). Le véhicule attendit quelques temps, et repartit. Au milieu de la foule qui savait où elle allait, des touristes, des Parisiens et des provinciaux en voyage d'affaire, en transit, ou que sais-je encore, il se tenait à l'entrée du bâtiment noir qui semblait se rapprocher tout seul et l'inviter à entrer. Levant les yeux vers cette masse ténébreuse, les bras le long du corps : Est-il vraiment nécessaire de se demander : et maintenant, qu'est-ce que je fais ?, pensa-t-il.
Quelques minutes plus tard, il embarquait pour Dijon.
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