Axel sursauta : le Furûtsu.paradaizu était à présent entouré de bâches blanches, et des hommes en combinaison anti-bactériologiques s'afféraient en masse, et couraient en tous sens, comme affolés. Bon sang ! pensa-t-il. L'une de leur cuves toutes fendillées a dû péter ! Malgré sa fascination pour le spectacle, il se détacha de la fenêtre et remonta le long couloir, éclairé au néon, entendant ça et là, faiblement, quelques toussottements et toujours ces mêmes bruits de coups contre les murs ou les portes. Arrivé à la chambre de Fabien, il frappa doucements trois coups. Il savait que le Toulonnais n'aimait pas être dérangé, aussi était-ce la première fois qu'il se risquait à cet acte. A peine avait-il frappé, que ce fut son plus proche voisin, Guillaume, qui sortit : "Je t'ai entendu frapper, alors je me suis dit qu'il y avait peut-être un problème...
- Non, je viens juste voir comment va Fabien.
- Au fait, tu as vu le Furupara ? C'est l'évasion des fraises mutantes ou quoi, hahaha. Les voir en scaphandre de l'espace, ça m'fait trooop rigoler !"
Axel n'avait pas encore pensé à sa réponse que la porte s'ouvrit lentement...
Il eut un imperceptible tressaillement du sourcil gauche lorsqu'un silhouette allongée et courbée parut dans l'entrebaillement de la porte. Fabien était enveloppé dans un édredon bleu foncé, et le visage qui en sortait semblait surgir de ce violent contraste de couleurs. Blanc, picotté de taches brunes, les yeux jaunis et troubles, la peau humide, cette face nouvelle s'imposa aux visiteurs. Guillaume ouvrit de grands yeux, et commença : "Ouh là, ça s'arrange pas ! A ta place, je m'inquièterais.
- C'est le Pablo qui vous envoie ?", fit la voix afaiblie, mais encore caractéristique, avec ce léger accent méridional . "Genre, il te conseille d'y aller, mais il n'y va pas lui-même. Deux poids, deux mesures. De toute façon, après l'incident du CD et l'affaire du fromage...
- Qu'est-ce que tu as, au juste ?", coupa Axel, passablement inquiet et qui n'avait pas envie de perdre du temps pour des bêtises.
"- J'ai pris la crève, une sacré crève. J'ai de la fièvre, je crois. J'ai froid, des sueurs etc. C'est toujours moi qui m'tape toutes les merdes". En l'écoutant parler, Axel put constater ce changement dans l'haleine que Guillaume lui avait décrit précédemment. Fabien, d'habitude si propre sur lui, avait toujours bonne haleine. Là, il ne pouvait s'agir que de la maladie. Il grelottait.
"- Laisse-moi te tâter le front", fit Axel, et il avança sa main vers le front sur lequel des cheveux étaient collés par la sueur. Au contact, Axel retira immédiatement sa main. Le front, loin d'être brûlant, était au contraire froid, non pas frais, mais bien froid. Après une seconde au cours de laquelle il jeta un regard à Guillaume, Axel reprit avec énergie : "Va immédiatement te coucher. Je vais chercher un médecin". Fabien tourna les talons et se dirigea vers son lit. La porte se referma sur les visiteurs, mais ils entendirent tout de même ces mots : "j'aurais dû faire du chinois".
Pendant cinq bonnes secondes, Axel et Guillaume se regardèrent, bien incapables de parler, puis Guillaume rompit le silence : "Qu'est-ce que tu comptes faire ?
- Comme j'ai dit, je vais chercher un médecin.
- Et moi, je vais veiller sur lui. De temps en temps, je sortirai sur le balcon et je jetterai un coup d'oeil dans sa chambre.
- Je n'sais pas si c'est une bonne idée d'aller sur le balcon.
- Oui, t'as raison, alors je vais attendre que tu reviennes avec le médecin.
- Oui. On se tient au courant s'il y a du nouveau. J'y vais, je m'dépèche. A plus." A peine Axel avait-il prononcé ces paroles que la porte d'en face se mit à retentir de coup sourds et assez violents. Comme si un corps mou tentait de l'enfoncer de l'intérieur.
- Mais qu'est-ce qu'il a, l'Homme-à-tête-de-fugu, ce soir ? fit Guillaume. Il est devenu fou ?" A ces mots, la porte s'ouvrit d'un coup et le personnage en question apparut, méconnaissable. Déjà assez imposant par sa taille et sa corpulence au dessus de la moyenne, celui qu'ils appelaient l'Homme-à-tête-de-fugu en raison de sa ressemblance troublante avec ledit animal se tenait devant eux, essoufflé, les yeux jaunes, injectés de sang, le visage violacé recouvert de plaques marron semblables aux tâches qui constellaient celui de Fabien. En dix mois, il n'avait répondu qu'une seule fois à la salutation d'Axel. Les deux jeunes gens, peu habitués à cette voix, furent peu rassurés devant cette intrusion soudaine, et en entendant le râle plus que le cri, qui sortit de cette bouche. Le colosse, légèrement courbé, les regarda l'un, puis l'autre, toujours essoufflé, puis, transformant son râle en une sorte de sifflement guttural, sans même prendre son élan, se jeta violemment sur Axel.
Lire le chapitre 5
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A la rescousse de France culture - si faire se peut
On sait le mal terrible que Mme Laure ADLER a fait à la direction de France culture en supprimnt des émissions très appréciées des auditeurs et d'un bon niveau intellectuel : le Panorama, Stacatto d'Antoine SPIRE, les Décraqués, Les chemins de la Musique... et en les remplaçant par des émissions de qualité micro-trottoir. Je ne suis pas contre des reportages d'une heure, mais je ne pense pas que tous aient leur place sur France culture, radio qui à la base était une Université populaire.
J'ai encore de vieilles cassette audio d'émissions enregistrée à la hâte et qui resteront chéries dans mon coeur, notamment un Panorama sur les écrivains du XVIIè siècle, ou encore les interventions nerveuses (avec lesquelles je n'étais pas toujours d'accord, d'ailleurs) d'Antoine SPIRE (sus-cité).
De même que FIP était devenu "Le mouv", jetant au rebus les rares programmations de jazz (ne parlons pas de la musique classique, considérée par la bourgeoisie aux commandes comme une musique "élitiste", donc haïssable), France culture a perdu un bon quart de ses programmes de qualité. La petite dame sensible sus-citée nous dit : Oui, mais la radio a gagné en audience ! Je lui réponds : Je ne me soucie pas de l'audience sur une radio de ce type : elle n'a pas à flatter les bas instincts (à commencer par la facilité), mais à fournir un savoir exigent, de qualité, en accord avec sa mission de radio publique de service public (une bonne répétition pour que tout le monde comprenne). Elle est la dernière à encore le faire. C'est en continuant ce nivellement qu'on fait de l'élitisme, puisque le nombre de ceux qui savent lire et écrire correctement le français, qui ont des références littéraires et musicales (pour qui Beethoven n'est pas un chien et Bartok pas une chauve-souris, mais sont deux musiciens...) continuera de se réduire comme une peau de chagrin (qui sait encore que cette expression provient d'un roman de Balzac, et que le chagrin est un "onagre", non pas un onaniste, mais un âne sauvage, décrit comme un animal fabuleux par le maître ?). Et je ne parle bien sûr pas uniquement de France culture, mais d'une tendance plus générale sur laquelle je reviendrai dans une prochaine note.
Aujourd'hui, je suis tombé (grâce à Acrimed) sur cette pétition, adressée notamment au nouveau dircteur de la station, M. David KESSLER. Il s'agit d'une chose très simple : consulter les associations d'auditeurs pour l'établissement des grilles de programmes. C'est une requête raisonnable et qui, je le crois, aurait tout à apporter à la fois à la station, et aux auditeurs. Je l'ai signée, et pourtant, je n'ai rien d'un "suffraget", ni d'un militant associatif. J'ai juste saisi l'occasion (désespérée, j'en ai peur, mais qui ne tente rien n'a rien, n'est-ce pas ?). On verra bien ce que ça donne. -
Je veille
Le lecteur habitué des lieux est peut-être légèrement déçu de ne pas trouver de nouveau texte depuis quelques jours dans cet espace. Qu'il se rassure : une fois que ma vie trépidante me laissera un moment de libre, je me remettrai à mon clavier, et vous connaîtrez la suite d'Emprise progressive (non, non, ne partez pas !) et de Toda of the Dead.
[Je rappelle la présence du concours d'illustrations pour Emprise progressive. Alors, faîtes-moi profiter de vos oeuvres de dessinateur, peintre, photographe ou tout simplement dénicheur de talents.]
A très bientôt ! -
Emprise progressive (5)
"Euh non." La dame, qui se tenait penchée devant lui, enveloppée dans un imperméable beige, eut un regard légèrement déçu, puis tourna les talons et s'apprêtait à reprendre son chemin, lorsque Raphaël se reprit "En fait si, je me trompe, la place est libre, je vous en prie".
Il s'agissait d'une personne d'une quarantaine d'années, au visage non maquillé et encore un peu joli, mais guère plus, qui évoquait non pas la pauvreté, mais la gène. Ses mains blanches étaient sèches, sillonnées de micro coupures, et ses cheveux beige ondulés n'avaient plus aucun gonflant. Elle s'assit en esquissant un sourire qui parut à Raphaël à la fois vulgaire et rassurant. Sans la connaître, il fit immédiatement confiance à cette femme. Il n'eut donc aucun mal à engager la conversation. Après quelques banalités, il en vint au sujet que toutes les femmes aiment évoquer : "Vous avez des enfants ?
- J'ai une fille, un peu plus jeune que vous. Quel âge avez-vous ? 28 ? 29 ans ?
- 29 ans.
- Elle a 23 ans. C'est encore une enfant pour sa mère, je ne vous apprends rien : vous savez comme sont les mères." Ayant dit cela, elle fit une pause, et regarda de l'autre côté de l'allée, par la fenêtre, cherchant à cacher un trouble. Puis, se reprenant, elle poursuivit : "Elle est à l'université en communication. Elle aimerait travailler dans les relations publiques. Elle a bien le contact. Très vivante, très indépendante, vous voyez." Raphaël sentait qu'elle avait envie d'en dire plus, mais qu'elle se contenait, soit pudeur, soit pour éviter simplement d'importuner son interlocuteur. "Avez-vous des frères et soeurs ?" demanda-t-elle - elle avait gagné sur elle même et contenait son désir de parler de sa fille.
"- Non, je suis fils unique", répondit Raphaël en espérant que la conversation n'allait pas trop tourner autour de lui.
"- Je suis sûr que vous vous entendriez bien avec ma fille.
- Je n'en doute pas.
- Au fait, j'oubliais de vous demander : où descendez-vous ?" Raphaël sentit sa jugulaire se remplir sous une pression plus forte qu'à l'ordinaire. Que faire ? Sans doute la vérité ne porterait-elle ici pas à conséquence. Il décida de prendre le risque. "Je descends à Dijon", répondit-il avec un sourire qu'il se forca à rendre aussi naturel qu'insignifiant. "Et vous ?"
"- Oh, moi, juste un peu plus bas". Ce fut la fin de leur courte discussion. La période de silence qui suivit permit à la dame de fermer les yeux pour somnoler un temps assez long. Raphaël était à moitié rassuré. Pendant leur échange, malgré la douleur, il était parvenu à faire passer sa douleur au second plan. Une chose l'intriguait : pourquoi la dame n'avait-elle pas dit exactement où elle allait. peut-être cela n'avait-il aucune importance, pourtant elle venait de le lui demander. En obtenant de lui ce renseignement et ne lui rendant pas la pareille, elle le plaçait en position d'infériorité, obligeant à lui poser la question, montrant qu'il s'intéressait à son histoire. Sans doute n'attend-elle que ça, pensa-t-il. A y réfléchir, il trouvait bizarre cette femme qui prenait le train avec un vieil imperméable qui laissait dépasser une jupe défraichie, sans sac à main, et qui s'était mise à lui parler, à lui. Et pourtant, et POURTANT ! il ne pouvait se départir de ressentir, pour elle, une certaine forme de confiance, ce qui l'agaçait et en même temps lui faisait très légèrement plaisir, sans qu'il y comprît rien lui-même.
Au bout d'un temps indéterminé, le train finit par s'arrêter en gare de Dijon. Raphaël se tourna vers sa voisine. A ce moment, celle-ci lui jeta un regard désespéré. "Tenez, je suis folle d'agir ainsi, mais j'ai l'intuition que je ne vous ai pas rencontré par hasard. Voici mes coordonnées. Sauvez ma fille." Elle lui tendit un papier, et à peine l'eut-il pris qu'elle le poussait vers la porte sans que ses questions trouvassent réponse. Raphaël resta quelques secondes, immobile sur le quai que désertaient les voyageurs, profondément troublé. Le visage subitement suppliant de cette femme restait gravé dans son esprit.
Raphaël reprit ses esprits et, s'efforçant de conserver son sens froid, se dirigea d'un pas raide vers la sortie. De marcher le faisait terriblement souffir, mais il était hors de question de s'arrêter, surtout pas en public. Il fallait d'abord arriver à son escale avant toute chose. Il se souvenait des paroles de Marescould : "sans perdre une seconde". Il avait déjà failli être intercepté à sa sortie de l'immeuble, et qui sait ce que ces hommes lui auraient fait !
Il ne se souvenait plus très bien de la géographie de Dijon, aussi dut-il prendre quelques mauvaises rues, et il pesta au passage contre son sens de l'orientation déficient. Il dévisageait tout le monde autour de lui, mais l'ambiance de la ville lui semblait moins instable, moins proche de basculer. Il avait l'impression de pénétrer dans une zone de calme provisoire. Un asile temporaire. Sa sécurtité irait décroissante en fonction du temps qu'il y resterait, mais pour l'heure, il fallait rejoindre l'adresse et il pourrait ensuite se faire soigner.
Après une bonne heure passée à marcher, il finit par arriver devant l'immeuble qu'il recherchait, une imposante batisse de style Restauration, à la façade noire comme passée au charbon. A l'interphone, il sonna chez un certain Hector Vouillot, osthéopathe.
"Oui, allô ?", fit une voix d'homme pleine et assurée.
"- Ouiii, c'est moi, Raphaël.
- Vous avez rendez-vous ?
- Non, mais c'est moi, Raphaël !
- Oui, rappelez-moi votre nom de famille...
- Je suis ton cousin, Raphaël Larcet !
- Raphaël Larcet... Ah ! Mais oui ! Je t'ouvre, monte." Et le petit moteur automatique libéra la targette de la serrure. Raphaël poussa la porte, en jetant un rapide coup d'oeil de chaque côté de la rue, déserte, et entra, refermant précautioneusement derrière lui. Puis il gravit les hautes marches de pierre en s'agrippant à la rampe, dans un effort sportif. Essoufflé lorsqu'il atteignit le quatrième étage, il prit quelques secondes pour se remettre, puis sonna. Hector Vouillot vint lui ouvrir.
"Raphaël ? Ca fait un bail ! Je ne t'aurais jamais reconnu si je t'avais croisé dans la rue !
- Heheh, moi non plus !
- Mais qu'est-ce qui amène un Parisien comme toi dans une petite ville de province ?
- Je peux entrer ?
- Oui bien sûr, j't'en prie." Raphaël ne se le fit pas dire deux fois, et l'épaisse porte blindée se referma sur eux... -
Un choix à faire
5 sur 10. Ce n'est pas la dernière note obtenue à un quelconque examen, c'est l'espace utilisé par ce blog sur les 10 Mo de la version gratuite de Haut et Fort. Avant de passer à la version payante qui me permettra de garder en un même site tous les textes, j'ai tout de même décidé de faire le tri et d'éliminer ce qui prenait de la place. Je parle bien sûr des images. J'ai déjà deux petits albums, mais même un petit album, ça prend de la place. J'ai donc choisi, dans un futur indéterminé, de supprimer l'album de photos du Japon. Que les personnes intéressées se dépèchent de les copier. Une simple mention de mon nom me suffira comme droit d'auteur si elles veulent les mettre en ligne sur leur site.
Je préfère supprimer ces photos du Japon, car j'aimerais qu'on arrête de considérer ce blog comme celui d'"un Français au Japon". Certes, je suis au Japon et je mets des traductions pour les lecteurs et amis japonais, mais le Japon est loin d'être le sujet principal de ce blog. Il n'est qu'une toile de fond (occasion d'écrire un article de temps en temps) et le centre de mes recherches, à titre professionnel. J'ai en outre un site qui est dédié à ces recherches en japonologie.
J'abreuverai le lecteur de nouvelles et d'articles sur les Grecs et les Romains jusqu'à ce qu'on finisse par considérer ce blog comme celui d'un écrivain à l'étranger (en l'occurence le Japon) et non le carnet de séjour au Japon d'un petit Français.
En outre, j'ai des photos de Lyon que j'aimerais mettre en ligne. Ca changera un peu.