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2005 Au fil de la plume 日記 - Page 29

  • Stalker

    Aujourd'hui, j'ai regardé le film "Stalker", d'Andreï TARKOWSKI, découvert grâce à Juan ASENSIO. Malheureusement, je n'ai pu dénicher qu'une version doublée en italien (mais fort joliment), langue que malheureusement je ne parle pas (est-ce que commander un café ou dire "Presto !" s'appelle parler l'italien ?). Je m'en suis contenté ("それでいい。しかたがないね。"), et j'ai lancé la vidéo que, je l'avoue, j'ai d'abord regardé d'un oeil distrait. En cours de visionnage, mon regard a changé. Bien que les dialogues m'échappassent totalement, me donnant envie de revoir le film à mon retour dans de meilleures conditions, j'ai trouvé, par les images et la musique, un intérêt plastique à l'expérience qui m'a satisfait et m'a rendu tout rêveur. J'ai même retrouvé l'image qui figure comme avatar du grand critique, lorsque le protagoniste repose, le regard halluciné, dans l'herbe, sur son bras replié. Avant de voir le film, cette image me faisait un peu penser à une sorte de Nosferatu mort, pas encore redevenu poussière (mais dans le film de MURNAU, le vampire ne disparaît pas une fois mort). Je ne raconterai pas l'histoire au lecteur, de peur de commettre quelques contresens, toujours est-il que, de ce que j'ai compris, le Stalker, un personnage en quête de vérité (mais qui n'est pas présenté comme infaillible) guide deux intellectuels à travers "la Zone" jusqu'à "la Chambre des miracles", un lieu mystique qui voit se réaliser les souhaits. Le rythme est lent, presque en temps direct, et les couleurs changent suivant le lieu. La première partie du film, en ville et parmi les ruines, est vue à travers des filtres de couleurs qui n'ont pas été sans me faire penser au récent Avalon d'OSHII Mamoru, alors que le rythme, la musique et une certaine atmosphère m'évoquaient par moment Aguirre, de Werner HERZOG. J'ai reconnu une sensibilité similaire à celle des auteurs du site "99 Rooms" que je présentai plus tôt, dans un rapport mélancolique mais non sentimental au décor dans son délabrement. Toutefois, il serait faux de croire que j'ai vu tout le film au prisme de références. Je l'ai regardé sans a-priori, et le plus souvent, je n'ai pensé à rien d'autre qu'à ce que je voyais et entendais. Pour un film de 2h34, j'ai trouvé qu'il passait plus vite qu'un Star Wars (!).
    J'ai été tout particulièrement sensible à la pureté des cadrages, aux travellings lents, aux plans séquence, à la sobriété des costumes, à la discrétion de la musique. Une impression d'intemporalité se dégageait, tout comme des rares oeuvres que je placerais dans la même catégorie cinématographique : les films de non divertissement - films (exigeants) de contemplation-réflexion, dont le seul qui me vienne à l'esprit maintenant est Sous le soleil de Satan, de Maurice PIALAT. L'histoire se passe plus ou moins de nos jours, mais cela n'a pas grande importance. Elle pourrait tout aussi bien se situer dans un lointain passé comme dans un futur proche. Aucun effet "stylé" (donc daté) dans la représentation de ces personnages grands, maigres, tondus, vêtus d'épaisses hardes qui n'attirent pas le regard comme le feraient les splendides costumes d'un Matrix.
    Je serais curieux de savoir si ce film est tiré d'une oeuvre littéraire. Si c'était le cas, je me la ferais envoyer et je la lirais immédiatement, ne serait-ce que pour accéder à la saveur des dialogues. [24/5/2005 : Le film est tiré du roman d'Arcadi et Boris STROUGATSKI : Pique-nique au bord du chemin.]
    En tout cas, ce visionnage m'aura introduit à l'oeuvre d'un grand cinéaste et permis de pénétrer un peu plus avant dans le monde de mon critique favori. Les termes "Zone" et "Chambre des miracles" auront pris un peu de consistance ; ce ne seront plus de simples images poétiques.
    J'ai également pu mettre la main sur "Solaris", du même auteur, malheureusement dans une version originale non sous-titrée. Je crois que je vais attendre d'être rentré avant de voir ce film.

    A consulter :
    Nostalghia.com (en anglais / in English) :
    http://www.acs.ucalgary.ca/~tstronds/nostalghia.com/

  • Un nouvel Art moderne (II)

    Après "99 Rooms", je vais tenter de présenter "NFH Propaganda". D'une technologie et d'une interactivité similaire à son prédécesseur, NFH (sigle de "Not For Human") a choisi un angle plus cinématographique, ou plutôt narratif, et moins poétique. Ici, plus d'oiseaux, de trolls mélancoliques ou de plantes imaginaires. Tout commence avec un écran de présentation qui auparavant rappelait les films de zombies de George A. Romero. Des voix inquiétantes, démoniaques, semblaient nous appeler dans une langue indéterminée (l'anglais ?). Une nouvelle présentation nous met face à un placard métallique des plus inquiétants, variation encore plus personnelle que je trouve intelligente et claire d'accès. Si l'on choisit d'aller écouter les musiques (par MonsterX), on sera un peu déçu par le décor, très 2ème degré (à la "Ze craignos monsterz"), qui n'est pas vraiment dans le ton du reste du site, mais l'écoute vaut le détour. Je ne suis pas spécialiste de ce genre de musique (je demanderai à Zlu), mais il m'a semblé qu'elle avait le mérite de mettre déjà bien dans l'ambiance. Les bruitages, notamment les voix, sont également irréprochables. C'est du cisellement d'ambiance.
    L'aspect visuel, présenté en français et en anglais avec une petite vidéo de la séance de prise de vues, est l'oeuvre du photographe professionnel William BELLE, artiste particulièrement doué, esthète, qui s'intéresse à la fois au nu et au bâtiment, de préférence d'architecture industrielle en ruine. Il a également fait des photos de bondage, activité complètement étrangère à mon univers mais force est de reconnaître que ces photos ne sont pas vulgaires et que l'esthétique est toujours présent, sans qu'on distingue une quelconque intention racoleuse. Nous avons affaire à de l'authentique photo d'Art.

    En quoi consiste au juste ce projet "NFH" ? Comme dans "99 Rooms", il s'agit d'une promenade semi-interactive avec des éléments du décor sur lesquels cliquer, comme si l'on voulait se rapprocher ou toucher les objets, en somme. Contrairement à "99 Rooms", ici, le spectateur ne se sent ni invisible, ni en sécurité. Pour peu qu'il accepte de jouer le jeu, il entre dans le scénario et est interpellé par les personnages du lieu, fantômes et autres zombies. Car soyons clair, et on l'aura compris en voyant mes liens, "NFH Propaganda" est un site d'horreur, destiné autant à satisfaire esthétiquement l'amateur d'Art qu'à surprendre, faire peur ou tout simplement mettre mal à l'aise. C'est un site comprenant des scènes choc que je déconseille aux âmes sensibles, bien qu'il s'agisse toujours de fiction. Je ne cautionnerais jamais des photos de gens torturés en vrai. Que cela soit clair.
    Oeuvre de fiction, oeuvre artistique, NFH Propaganda commence en affichant la couleur. La présentation, les musiques comme le texte de présentation nous font comprendre qu'on va avoir peur. Les auteurs l'expliquent simplement, mais clairement : "Nous travaillons sur nos angoisses les plus primaires, comme la peur du noir, des visions furtives, et quelques scènes gores...". Il s'agit bien d'"une propagande de terreur visuelle et sonore via le concept du labyrinthe et du site en lui même qui est en constante évolution" (courriel du webmestre).
    Dès lors qu'on décide d'entrer dans le labyrinthe, on se retrouve devant une énorme porte métallique, très sale. C'est une deuxième chance de ne pas pousser plus loin. Un fois ouverte, l'aventure commence vraiment.
    Personnellement, j'ai distingué deux niveaux : celui de l'usine, avec une longue scène dans le garage, où on trouve une vieille 2CV, et celui de la maison. medium_ghost.jpg
    On ne peut pas dire que l'horreur monte en intensité : dès le début, on tombe sur une tête coupée et animée ! On passe d'une horreur à une autre avec d'habiles phases de transition qui permettent d'éviter l'effet du "trop c'est trop" qui disqualifierait le propos. Sans aller jusqu'à l'hyper réalisme, NFH reste toujours dans la vraisemblance, ce qui n'empêche pas le fantastique. Jeux sur les lumières, les couleurs, les angles de vue, certaines scènes font penser à des tableaux et rappellent les films de Dario Argento.
    Au niveau du fond, c'est moins clair, mais comme je l'ai dit plus haut, davantage scénarisé que "99 Rooms". L'histoire est donc celle d'un visiteur un peu trop curieux, plutôt voyeur que réellement justicier, qui s'aventure dans une usine, puis dans la maison qui la jouxte, pour tenter d'en savoir toujours plus sur les événements qui s'y produisent. Il découvre des cadavres atrocement mutilés sur sa route, est menacé par des fantômes et finit par rencontrer quelques uns des auteurs de ces massacres en train d'oeuvrer "en direct". Parfois, comble de la perversité, il lui faudra pour passer dans la pièce suivante activer des mécanismes qui s'avèreront funestes à certaines victimes et feront de lui un tueur ! Les hurlements des victimes innocentes l'appelant à l'aide ne l'empêcheront pas d'actionner les interrupteurs... Tout cela par désir d'en savoir toujours plus ! Qui se livre à ces massacres ? Pourquoi ? Jusqu'où toute cette atrocité va-t-elle nous mener, si ce n'est à la folie ? Du début à la fin (du moins, jusqu'à l'écran qui nous dit "En construction"), on se sent observé, et on l'est plutôt deux fois qu'une ! medium_scared.jpgEt pourtant, l'envie de progresser est forte, et on se laisse entraîner par ce démon de site sur la route de l'horreur.

    Question technique, j'exprimerais quelques regrets minimes, d'abord comme je l'ai dit, concernant la page du sound test, qui n'est du point de vue visuel pas en phase avec l'aspect 1er degré du projet ; ensuite, les temps de chargements entre les niveaux, mais on s'y fait encore assez vite, et avec une bonne connexion, ça passe bien. Le plus gênant, me semble-t-il, était jusqu'à récemment l'impossibilité, contrairement à "99 Rooms", de reprendre notre aventure là où on l'avait laissée, ou tout simplement d'accéder à une scène particulière qu'on aime bien. Il fallait à chaque fois tout recommencer, ce qui était parfois dissuasif. C'était le principal défaut technique de ce site, que ses auteurs ont corrigé en instaurant un système de carte très bien conçu et facile d'accès, pour un grand confort.
    J'invite donc l'internaute esthète et chevronné à aller faire un tour dans cette usine des atrocités. L'amateur de films de genre n'aura pas peur, et reconnaîtra des éléments clés de son univers favori. Les autres vivront une expérience pleine de malaise, mais aussi contempleront une beauté plastique maîtrisée. Si comme moi, vous aimez les usines désaffectées, le clair-obscur et les ambiances de lieux abandonnés, ce site est fait pour vous.

  • Nécrologie : Une fleur se referme

    Il y a quelques heures, un blog s'est éteint. Il s'agit de celui de V., "le dissblog - Pour maquiller ma thèse", "mots et recherches de jour en jour", modèle d'élégance, de pudeur des mots et en même temps de mise à nu du coeur. V. est une poétesse qui sut donner à la blogosphère de Haut et fort une parole subtile, d'une voix "basse et faible", pleine de charme et du romantisme le plus estimable, bien loin de la ringardise. Au contraire. Avec V., c'étaient les grandes figures de la Belle époque qui nous parlaient, et elle leur répondait, en parallèle, avec ses mots, et tant pis si je ne comprenais pas toujours, car elle me berçait de cette douce musique qui n'était qu'à elle. De temps en temps, elle sortait de son monde enchanté et venait prodiguer à quelques chanceux de consolantes ou encourageantes paroles. J'espère (mais j'en suis presque sûr) que la nouvelle V., sortie du monde la blogosphère, pourra briller dans le monde réel comme elle sait le faire. Je lui souhaite bonne chance.
    A très bientôt, chère V. Vous me manquerez.

  • La femme de trente ans

    Je vous livre ici quelques extraits de ce roman, que je lis actuellement, en espérant qu'ils vous donneront envie de (re)découvrir Balzac.

    Ici le portrait de la tante par alliance, personnage éminamment sympathique, voltairien, qui aide l'héroïne à entamer un travail d'introspection.
    "La comtesse de Listomère-Landon était une de ces belles vieilles femmes au teint pâle, à cheveux blancs, qui ont un sourire fin, qui semblent porter des paniers, et sont coiffées d'un bonnet dont la mode est inconnue. Portraits septuagénaires du siècle de Louis XIV, ces femmes sont presque toujours caressantes, comme si elles aimaient encore ; toujours exhalant la poudre à la maréchale, contant bien, causant mieux, et riant plus d'un souvenir que d'une plaisanterie. L'actualité leur déplaît." (chap. Ier)

    Cette description de la Touraine, qui me rend presque mélancolique :
    "A sa droite, le voyageur embrasse d'un regard toutes les sinuosités de la Cise, qui se roule, comme un serpent argenté, dans l'herbe des prairies auxquelles les premières pousses du printemps donnaient les couleurs de l'émeraude. A gauche, la Loire apparaît dans toute sa magnificence. Les innombrables facettes de quelques "roulées", produites par une brise matinale un peu froide, réfléchissaient les scintillements du soleil sur les vastes nappes que déploie cette majestueuse rivière. Ca et là des îles verdoyantes se succèdent dans l'étendue des eaux, comme les chatons d'un collier. De l'autre côté du fleuve, les plus belles campagnes de la Touraine déroulent leurs trésors à perte de vue..."

    Enfin, le portrait du mari, un notable physiquement courageux, socialement prudent mais au fond très médiocre. Quelle actualité encore aujourd'hui !
    "Ne se rencontre-t-il pas beaucoup d'hommes dont la nullité profonde est un secret pour la plupart des gens qui les connaissent ? Un haut rang, une illustre naissance, d'importantes fonctions, un certain verni de politesse, une grande réserve dans la conduite, ou les prestiges de la fortune sont, pour eux, comme des gardes qui empêchent les critiques de pénétrer jusqu'à leur infime existence. Ces gens ressemblent aux rois dont la véritable taille, le caractère et les moeurs ne peuvent jamais être ni bien connus ni justement appréciés, parce qu'ils sont vus de trop loin ou de trop près. Ces personnages à mérite factice interrogent au lieu de parler, ont l'art de mettre les autres en scène pour éviter de poser devant eux ; puis, avec une heureuse adresse, ils tirent chacun par le fil de ses passions ou de ses intérêts, et se jouent ainsi des hommes qui leur sont réellement supérieurs, en font des marionnettes et les croient petits pour les avoir rabaissés jusqu'à eux. Ils obtiennent alors le triomphe d'une pensée mesquine, mais fixe, sur la mobilité des grandes pensées. (...) Néanmoins, quelque habileté que déploient ces usurpateurs en défendant leurs côtés faibles, il leur est bien difficile de tromper leurs femmes, leurs mères, leurs enfants ou l'ami de la maison ; mais ces personnes leur gardent presque toujours le secret sur une chose qui touche, en quelque sorte, à l'honneur commun ; et souvent même elles les aident à en imposer au monde."

  • Chute du cours du lien

    Comme le lecteur peut le constater, je fais moi aussi le tri parmi mes liens. Je ne crois pas avoir encore supprimé de liens vers des sites ou blogs qui m'avaient mis en lien, mais si cela devait se produire, qu'ils reçoivent mes excuses. J'ai envie de recentrer mes liens sur des sujets qui concernent plus particulièrement ce blog : la littérature, la spiritualité et le Japon.
    Que je supprime un lien ne veut pas dire que je n'aime plus le site vers lequel il envoie. Je continue à en garder l'adresse dans les marque-pages / favoris du mon navigateur.
    Pour résumer, tout est question d'adéquation avec le thème général de ce blog.