J'ai vécu à une époque (en France) dans un appartement situé dans un immeuble dont la particularité était d'avoir un garage souterrain commun avec l'immeuble mitoyen. Les emplacements de l'immeuble 1 et de l'immeuble 2 étaient réunis de chaque côté d'une ligne imaginaire, sans doute pour des raisons de sécurité en cas d'inondation. Il est dans mes principes de saluer mes voisins, et je n'ai jamais manqué de le faire. De même, quand on me salue, je réponds, même si je ne (re)connais pas la personne en question. Or les gens de l'immeuble d'à côté avaient la particularité de ne jamais dire bonjour, et même, de s'abstenir de répondre quand la salutation venait de notre côté. Sans doute estimaient-ils que nous n'en valions pas la peine. Il faut préciser que l'immeuble 1 était légèrement plus riche que l'immeuble 2 : les rambardes des balcons et des fenêtres, au lieu d'être faites de barres, figuraient des feuilles de lierre entrelacées ; ensuite, ce bâtiment faisait l'angle ; enfin, il avait une entrée plus grande avec des plantes vertes.
Ici, la moitié de nos voisins japonais nous salue, mes compatriotes et moi-même, ce qui est déjà mieux. Pourtant, force est de s'interroger sur les motifs du silence obstiné des autres, cachant leur mutisme derrière un visage dénué de toute expression. Lorsque j'interroge mes amis japonais, ils me font tous la même réponse : "c'est parce qu'ils sont timides". J'y suis habitué, mais j'ai du mal à l'accepter. Les personnes en question sont des hommes, des adultes, certains plus grands et plus musclés que moi : je ne vois pas ce qui en moi leur ferait peur. La timidité empêche-t-elle d'être poli ? Je doute par ailleurs que leur mutisme soit lié à des raisons économiques. Je vois davantage une question de physionomie. De même que notre physique peut nous attirer des succès féminins, il peut aussi susciter l'antipathie masculine. Peut-être même notre odeur, même pour des personnes à l'hygiène scrupuleuse comme votre serviteur, peut-elle être perçue, qui sait, ne serait-ce que parce que l'alimentation n'est pas à 100 pourcents la même. Or, les Japonais sont particulièrement sensibles à l'odeur, et zlu m'a raconté que de nombreuses jeunes filles japonaises se mettent à détester leur père passé un certain âge à cause de l'odeur d'homme de ce dernier ! D'après mes amis japonais, je n'ai pas d'odeur particulière, étranger ou pas. Donc, dans mon cas, l'odeur n'est pas en cause. Reste l'aspect physique. Le délit de faciès est ici chose courante chez les JEUNES hommes.
Je n'arrive pas encore à déterminer exactement pourquoi les femmes sont plus accueillantes avec les étrangers que les hommes. Sans doute l'éducation japonaise prépare-t-elle la femme à servir l'homme quel qu'il soit, et l'homme japonais en abuse-t-il ; aussi, lorsqu'un étranger arrive et fait un sourire, ce sont des années de visionnages de films américains qui ressurgissent. "L'homme blanc respecte les femmes".
Il est étonnant de constater à quel point le groupe des hommes de 14 à 40 ans est généralement inamical, alors qu'avant et après, rien de tel ! Or, si je ne m'abuse, cette période est celle où l'on cherche le plus à séduire, et force est de constater que l'homme japonais n'est pas séducteur (je connais cependant des exceptions), ni romantique. Il se marie, et traite sa femme comme bobonne et l'appelle "la mère". Sa (rare) activité sexuelle, en dehors du fantasme pouvant tirer sur la déviance (voir l'industrie mastodontique du porno, que ce soit en films, photos, bandes-dessinées, dessins animés ou jeux vidéo où l'on trouve toutes les abjections, de la pédophilie "bon enfant" à la torture etc.), est souvent exercée auprès de prostituées (des femmes qu'il n'a pas à séduire, et dont il est sûr qu'elles ne lui rirons pas au nez ni ne le rejetteront).
A ce propos, le Japon étant le pays de la femme objet, il n'est pas rare de tomber sur de véritables catalogues de femmes, avec leur photos, leur description, leurs spécialités, etc. Il est même distribué des prospectus de maisons closes dans les boites aux lettres des résidences universitaires.
(Je me permets une comparaison avec le monde arabe d'aujourd'hui. Oubliées les Mille et une nuits, dans le monde arabe d'aujourd'hui, la Vertu voile la femme, mais Elle n'est pas la seule à en bénéficier. La société machiste des hommes en profite. Les femmes sont des objets : elles sont vendues, échangées, etc. et sauf de rares chanceuse ou des modèles de bravoure, elles ont le plus grand mal à faire carrière ou exprimer des opinions politiques à l'égal des hommes. En outre, comme il ne les voit pas, l'homme y pense tout le temps, aussi une fois rentré chez lui ce dernier se livre-t-il avec zèle au devoir conjugal.)
Au Japon, la vertu n'est jamais citée. Les femmes sont présentes partout, en maillot de bain, en minijupe, dès l'école primaire. On montre des enfants dansant de façon idiote et ambiguë dans des publicités 24h sur 24, la bande dessinée est souvent le cadre de l'érotisation de l'enfant et de l'adolescent, la rue voit passer les tenues les plus extravagantes et parfois fort vulgaires etc. La femme est objet, et l'homme en profite. Les femmes peuvent accéder à des postes à responsabilités, mais elles sont moins nombreuses que les hommes, à compétence égale. En outre, dans les grandes entreprises, on les pousse (harcèle moralement) à démissionner à un certain âge. Le Japon voit lentement la position de la femme évoluer positivement dans certains domaines (éducation, promotion dans l'administration, le divertissement, l'Art et l'artisanat, création par des femmes de PME)(1), mais la base de la société la maintient dans ce rôle niais, mignon, de lolita consommatrice, puis de maman consommatrice, enfin de mémé consommatrice.
Voilà comment je suis glissé d'un parking souterrain à l'exploitation de la femme. Tout est lié, vous dis-je !
(Attention ! Je n'ai pas dit que les personnes qui ne répondaient pas à mon bonjour étaient des pervers sexuels. Ce ne sont à mon humble avis que des racistes pour certains, et des mal élevés pour les autres.
Et cela ne m'empêche pas d'aimer par ailleurs le Japon pour d'autres raisons.)
[Je reviendrai sur le sujet de la pédophilie au Japon plus en détail dans une future note.]
(1) Sur ce sujet, voir Anne GARRIGUE : Japonaises, la révolution douce, Philippe Piquier.
2005 Au fil de la plume 日記 - Page 20
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Salutation et timidité - machisme - exploitation de la femme / 外国人に挨拶をしないこと - 日本の男性優位制度 - 日本における物としての女性
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Nouveaux liens
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Un nouvel Haut et fort
Eh bien... Effectivement, le bouton "Vichy sélection" fait son apparition. De plus, les notes voient par défaut les commentaires fermés au bout de deux semaines. Il faut que je réédite chaque note une par une pour autoriser les commentaires. Du boulot.
Au chapitre des améliorations, quand même (soyons juste), les communautés. Sans être communautariste (loin s'en faut), elle m'ont permis de découvrir de nombreux blogs (par exemple LYON rugit) et d'avoir quelques rares lecteurs de plus (deux ou trois).
Les trackbacks, il faut que j'étudie ça. Pour le moment, c'est assez vague... -
Poème (I)
Je ne suis pas un poète. Je ne me suis jamais considéré comme tel un seul instant. Je manque d'ailleurs de jugement en matière de poésie (j'aime un grand nombre de poètes fort différents), mais il m'est arrivé d'écrire des poèmes. En voici un que je livre comme "un petit rien" (sous-titre de ce blog), sans plus. Continuer à gloser là-dessus serait de ma part prétentieux et contraire à mon intention.
"Asphodèles de la rentrée (N°8)
Entre de petites têtes,
Je m’en suis allé,
Repêché des blés
Où mon amusement
M’avait conduit.
Là ; sur un tertre des plus riants, j’ai rencontré ROUSSEL
Qui comptait ses orteils au son
D’un nocturne de César FRANK
Devant lui, une femme nue.
J’ai souvent repensé à ces instants
A la lumière de ce que j’appris plus tard.
A cette heure mon esprit en frissonne encore, et j’ai peur…
Qu’il fasse le jouet…
Des asphodèles
de la rentrée.
A.M., 4 janvier 2000,
année mythique s’il en fut.
P.S. : De plaisir, la reprendre ?
Non. Des asphodèles de la rentrée.
Où les têtes m’ont-elles fait le jouet des femmes nues ?…
Et ROUSSEL ?" -
Stage de fabrication des "soba" そばの作り方の研修
Hier, invité par un gentleman japonais, je me suis rendu, en compagnie d'un ami, à la campagne (c'est la saison du repiquage du riz, ou "taué 田植え") où nous avons appris, auprès d'un artisan plusieurs fois récompensé, à confectionner des soba そば [蕎麦], les nouilles de blé dur dont les Japonais sont friands, et qui peuvent se manger chaudes ou froides. Cette fabrication obéit à des règles précises. Je n'ai pas compris la nécessité de certains mouvements, mais je m'y suis plié. C'est le cas de le dire, le grand bol dans lequel les ingrédients sont mélangés à la main étant assez bas, mon dos a pâti tout autant que les muscles de mes bras. Le résultat de nos effort s'est avéré satisfaisant, et c'est tant mieux car je déteste gâcher de la nourriture.
On a tort d'imaginer le Japon comme un pays sans verdure. C'est en fait l'espace urbain qui y est le plus mal réparti. La plaine qui s'étend de Tôkyô à Shimonoseki est en effet grise de maisons sans beaucoup de d'interruption, en revanche, les montagnes sont à l'état sauvage, les petites îles sont sous-peuplées et l'est reste très naturel. Bien sûr, comme toujours, des maisons en béton et taule ondulée viennent un peu dégrader le paysage, mais on trouve ça et là, à la campagne, une ou deux maisons traditionnelles de qualité, comme celle où je suis allé, possédant, chose rarissime dans ce pays, un bâtiment annexe en PIERRE !
L'espace d'une journée, j'ai oublié l'inquiétude qui m'habite, concernant le sort de la France folle, du Japon bête, de l'Europe malade et du monde sale.