[MC-Croche 8 est un homme très affairé. Il a tout de même pris le temps de rédiger la suite de sa nouvelle que je lui réclamais à corps et à cri.]
« La journée commence bien… » soupira Bottello qui, histoire de passer le temps autant que d’oublier cet incident bizarre, entreprit de relire une nouvelle fois le C.V de Pierre Etienne Ancelin, le seul qu’il eut sélectionné au terme d’une recherche éprouvante En effet, ça n’avait pas été une mince affaire que de découvrir enfin, parmi une masse énorme de candidatures dont la plupart étaient absurdes quand elles n’étaient pas burlesques, celle correspondant idéalement au profil recherché et cumulant les qualités multiples, et quelquefois contradictoires, exigées par un poste aussi discret qu’indispensable : secrétaire particulier d’un homme de lettres.
A la vérité, cela ne faisait guère plus d’une année que Raul Bottello s’était peu à peu convaincu de la nécessité d’être ainsi secondé dans ses activités littéraires… Auparavant, il avait tout assumé seul et ne devait qu’à lui-même son incroyable réussite ; toutefois, il ne pouvait maintenant se cacher davantage certains faits déplaisants : son inspiration piétinait, l’écran de son ordinateur restait trop souvent vierge et, pire que tout, la vente des ses deux derniers livres accusait un tassement inquiétant… Un apport de sang neuf devenait indispensable et c’est au choix judicieux d’un élément extérieur que s’en remettait Bottello pour réussir la transfusion.
Sur ce plan, il faut bien admettre que le dossier de Pierre Etienne Ancelin paraissait prometteur… Titulaire d’une maîtrise en littérature comparée, passionné, en outre, par la langue et la civilisation japonaise jusqu’à être bilingue autant qu’expert en arts martiaux, il possédait aussi l’avantage, décisif aux yeux de Bottello, de préparer une thèse monumentale sur son œuvre… Sa lettre de motivation, quoiqu’un brin exaltée, peut-être, dans sa formulation, supposait la promesse d’un dévouement aveugle à la cause du Maître et une admiration sans faille.
Sensible jusqu’à la dépendance à ces vapeurs d’encens, Bottello n’avait pas hésité trop longtemps pour choisir ce jeune homme à la fois si brillant et si bien renseigné, et c’était lui qu’il attendait dans les salons du « Royal Swiss Palace » avec une impatience grandissante.
Avant que d’assister à une rencontre qui devait s’avérer, pour l’un et l’autre, d’une importance capitale, il conviendrait sans doute de revenir un instant sur la carrière fulgurante et rien moins qu’orthodoxe d’un écrivain parvenu, en moins d’une dizaine d’années, à une popularité aussi complète que surprenante.
Comme l’avaient constaté de nombreux critiques, Raul Bottello était apparu tel une sorte d’« OVNI » dans le paysage littéraire mondial, et l’on est obligé d’avouer que rien dans son passé ne semblait le destiner à connaître pareille gloire.
Brésilien d’origine, il s ‘était, au terme d’une scolarité quelque peu « chaotique », essayé à des emplois divers…Dans le meilleur des cas, cela n’excédait guère six mois, soit qu’il y eut entre ses patrons et lui incompatibilité manifeste, soit le travail proposé se révélât trop en dessous de ses aspirations. C’est ainsi qu’on le vit successivement : « saute-ruisseau » dans l’étude du notaire Da Silva, vendeur-démonstrateur au sein d’une grande entreprise de sanitaire, et même joueur de maracas dans le petit orchestre de Joao Santos-Lopes, qui se produisait alors, sans trop de succès, dans les bars à touristes…
Le salut lui advint de façon très inattendue, alors qu’il terminait un stage au « courrier de Sao-Polo », feuille locale ou il était entré grâce à la protection d’un chef-typographe amateur de sambas.
Lire le chapitre III
Littérature 文学 - Page 10
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Le sabre du grimpant (II)
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Questionnaire de lecture
1/ Combien de livres lisez-vous par an ?
Entre "pas assez" et "vraiment pas assez" : ma soif de lecture est comme le tonneau des Danaïdes. Hélas, je suis loin d'avoir le temps pour m'adonner à ma passion de façon satisfaisante.
2/ Quel est le dernier livre que vous ayez acheté
En japonais : Miyamoto Tsunéichi, tabi suru minzoku gakusha 『宮本常一 旅する民俗学者』 (Miyamoto Tsunéichi, un ethnographe du folklore qui voyageait), collectif sous la responsabilité de SANO Shin'ichi 佐野眞一 pour mon travail ;
En français : La sociologie des religions (Que sais-je ?) avant mon départ, pour mon travail ;
Pour le plaisir, j'ai oublié. Je sais juste qu'avant de partir, j'ai sélectionné quelques livres à emporter (achetés précédemment) : La femme de trente ans, de BALZAC, Diablerie, de BOULGAKOV, La Bible (trad. CHOURAQI).
3/ Quel est le dernier livre que vous ayez lu ?
En japonais : Minzokugaku he no michi 『民俗学への道』 (Le chemin de l'ethnographie du folklore), par MIYAMOTO Tsunéichi.
En français : Diablerie, de BOULGAKOV
4/ Listez cinq livres qui comptent pour vous.
1. Les Mémoires de Louis de SAINT-SIMON ;
2. Promenade dans un parc de Louis CALAFERTE ;
3. Là-bas, de Joris-Karl HUYSMANS ;
4. Pantagruel, de François RABELAIS ;
5. Zadig, de VOLTAIRE.
Pour un plus large aperçu (cinq, c'est trop peu !), voir les livres qui m'ont marqué, et mes conseils de lecture.
5/ A qui allez-vous passer le relai ?
A zlu, à V., à t3nDo, à Fleur, à Oliviermb, à Waï-ling -
読書のすすめ (Un conseil de lecture en japonais) : 梅田裕一 UMEDA Yûichi
梅津裕一の『闇の魔術師ネフィリス』 (Yami no majutsushi Nefirisu (Néphilis, Sorcier des Ténèbres), d'UMEDA Yûichi)、全2巻 / 2 volumes.
『ネフィリス』を発見したのは三年前に生駒にホームステーイをしていた時でした。その時、カバーに惹かれたのです。日本語が少しだけ読めましたが、一応その本の二巻を買い、少し読んでみ、箱の中で忘れました。が、昨日、ジュンク堂で偶然イに思い出して、その本を探し、見つけました。その二巻目をもう持っていることを忘れたので買いました。帰ってから、確かめて、私の間違いが分かりました。せっかく買ったので、フランス人の友達に上げました。読みやすい本だと今は言え、日本語が結構上達したんだなと思います。来年、暇な時間があったら、『ネフィリス』を全部ちゃんと終わりまで読むことにしました。とりあえず、『ネフィリス』を読むことははかなりいい日本語の練習だけでなく、相当におもしろいファンタジーの「ノベル」で、格好いい雰囲気・主人公が描写され、サスペンスやアクションの冒険小説でもあります。
En voici une critique sympathique trouvée grâce à une petite recherche Google :
「タイトルの通り闇の魔術、それも死霊を操る死霊術師ネフィリスが主人公のファンタジーです。裏切りの代償として友と妻による命をかけた呪詛を受け、さらには自らの娘を殺したという過去を持つ彼は、ある目的のために放浪の旅を続けています。こんな彼が立ち寄ったのが、領主が病に倒れ、その娘リリティアが領主代行を務める街ファルヴァース。しかしこの街では、住民同士の衝突が激化しつつあり、その裏には、謎めいた「魔女」の暗躍がありました。ネフィリスはなりゆきから「魔女」と対決することになるのですが……。タイトルの通り「悪意」がキーワード。それはもう最初から終わりのほうまでドロドロと……。が、ネフィリスが「予想より」優しかったりしてちょっと意外でした(^^;)。それを知るのはリリティアと、何故かネフィリスにつきまとっている猫の民ルーニャぐらいなんですが……。」
vol. 1 : 「闇魔術師ネフィリス 悪意の街」/梅津裕一/スニーカー文庫 (角川書店) Ed. Kadokawa shoten
[ISBN4-04-425001-4][イラスト=広瀬総士]
vol. 2 : 「闇魔術師ネフィリス 聖なる暗黒」/梅津裕一/スニーカー文庫 (角川書店)
[ISBN4-04-425002-2][イラスト=広瀬総士]
Désolé, il n'existe à ce jour aucune traduction française de ces excellents romans populaires (et si je ne le fais pas moi-même, personne ne risque de le faire). Ce serait donc un peu vain de traduire la critique et ma note intégralement en français. Les japonisants, en revanche, sont invités à me faire leurs observations. Que ceux qui ont des suggestions de lectures en japonais (livres non traduits en français) laissent un commentaire.
もしお勧めの本があれば、お気軽にコメントでどうぞ。
Sources :
http://www.tcp-ip.or.jp/~mt2knm/main/UmetsuYuuichi.html -
De Salluste
"Il eut toujours des lumières très justes sur le bien et sur le mal."
Charles de BROSSES, Président au Parlement de Dijon
"Salluste se met en scène, et (...), en se faisant à contre-temps moraliste, il ne blesse pas seulement le goût, il ment encore à la vérité, et veut se donner le masque de vertus qu'il n'a pas ; comme Sénèque, qui écrivait sur la pauvreté avec un stylet d'or, il prêche la morale au milieu des richesses, fruit de ses déprédations."
François RICHARD, 1933
Aujourd'hui, pas de réflexion, juste une citation qui constitue une petite pierre de plus à ma mini anthologie de la littérature mondiale. Auteur découvert par hasard, Gaius Sallustus Crispus (87 avt. J.C. - 36 avt. J.C.) semble avoir mené une vie fort active, physiquement (campagnes militaires peu glorieuses), mais surtout intellectuellement (c'est un avocat, un historien et un moraliste) et socialement (carrière politique pleine de renversements, avec des "affaires" dont il ne sort pas grandi) et, quoi qu'il en dise, n'avoir pas dédaigné les plaisirs matériels de le vie (il est chassé du Sénat pour "immoralité"). Ce texte offre des réflexions menées par une certaine idée d'un idéal moral, fait de sobriété et d'ascétisme, mais cette contradiction (ou cette réécriture autobiographique, tentative d'induire en erreur les générations futures sur ce que fut sa vie) ne doit pas nous faire dédaigner une oeuvre majeure qui n'a cessé d'être lue.
En supprimant les noms propres, on est en outre frapé par l'actualité de tels textes, comme souvent, d'ailleurs, chez les Anciens.
"I. - L'homme a tort de se plaindre de sa nature, sous prétexte que, faible et très limitée dans sa durée, elle est régie par le hasard plutôt que par la vertu. Au contraire, en réfléchissant bien, on ne saurait trouver rien de plus grand, de plus éminent, et on reconnaîtrait que ce qui manque à la nature humaine, c'est bien plutôt l'activité que la force ou le temps. La vie de l'homme est guidée et dominée par l'âme. Que l'on marche à la gloire par le chemin de la vertu, et l'on aura assez de force, de pouvoir, de réputation ; on n'aura pas besoin de la fortune, qui ne peut ni donner ni enlever à personne la probité, l'activité et les autres vertus. Si, au contraire, séduit par les mauvais désirs, on se laisse aller à l'inertie et aux passions charnelles, on s'abandonne quelques instants à ces pernicieuses pratiques, puis on laisse se dissiper dans l'apathie ses forces, son temps, son esprit ; alors on s'en prend à la faiblesse de sa nature, et on attribue aux circonstances les fautes dont on est soi-même coupable. Si l'on avait autant de souci du bien que de zèle pour atteindre ce qui nous est étranger, inutile, souvent même nuisible, on ne se laisserait pas conduire par le hasard ; on le conduirait et on atteindrait une grandeur telle que, loin de mourir, on obtiendrait une gloire immortelle.
II. - L'homme étant composé d'un corps et d'une âme, tout ce qui est, tous nos sentiments participent de la nature ou du corps ou de l'esprit. Un beau visage, une grosse fortune, la vigueur physique et autres avantages de ce genre se dissipent vite, tandis que les beaux travaux de l'esprit ressemblent à l'âme : ils sont immortels. Tous les biens du corps et de la fortune ont un commencement et une fin : tout ce qui commence finit ; tout ce qui grandit dépérit ; l'esprit dure, sans se corrompre, éternellement ; il gouverne le genre humain, il agit, il est maître de tout, sans être soumis à personne. Aussi, peut-on être surpris de la dépravation des hommes qui, asservis aux plaisirs du corps, passent leur vie dans le luxe et la paresse, et laissent leur esprit, la meilleure et la plus noble partie de l'homme, s'engourdir faute de culture et d'activité, alors surtout que sont innombrables et divers les moyens d'acquérir la plus grande célébrité.
III. - Mais, parmi tous ces moyens, les magistratures, les commandements militaires, une activité politique quelconque ne me paraissent pas du tout à envier dans le temps présent ; car ce n'est pas le mérite qui est à l'honneur, et ceux mêmes qui doivent leurs fonctions à de fâcheuses pratiques, ne trouvent ni plus de sécurité, ni plus de considération. En effet recourir à la violence pour gouverner son pays et les peuples soumis, même si on le peut et qu'on ait dessein de réprimer les abus, est chose désagréable, alors surtout que toute révolution amène des massacres, des bannissements, des mesures de guerre. Faire d'inutiles efforts et ne recueillir que la haine pour prix de sa peine, c'est pure folie, à moins qu'on ne soit tenu par la basse et funeste passion de sacrifier à l'ambition de quelques hommes son honneur et son indépendance.
IV. - Aussi bien, parmi les autres travaux de l'esprit, n'en est-il pas de plus utile que le récit des événements passés. Souvent on en a vanté le mérite ; je ne juge donc pas à propos de m'y attarder, ne voulant pas d'autre part qu'on attribue à la vanité le bien que je dirais de mes occupations. (...)
J'ai souvent entendu dire de (...) grands citoyens romains que, en regardant les images de leurs ancêtres, ils se sentaient pris d'un ardent amour pour la vertu. A coup sûr, ce n'était pas de la cire ou un portrait qui avait sur eux un tel pouvoir ; mais le souvenir de glorieuses actions entretenait la flamme dans le coeur de ces grands hommes et ne lui permettait pas de s'affaiblir, tant que, par leur vertu, ils n'avaient pas égalé la réputation et la gloire de leurs pères. Avec nos moeurs actuelles, c'est de richesse et de somptuosité, non de probité et d'activité, que nous luttons avec nos ancêtres. Même des hommes nouveaux, qui jadis avaient l'habitude de surpasser la noblesse en vertu, recourent au vol et au brigandage plutôt qu'aux pratiques honnêtes, pour s'élever aux commandements et aux honneurs : comme si la préture, le consulat et les autres dignités avaient un éclat et une grandeur propres, et ne tiraient pas le cas qu'on en fait de la vertu de leurs titulaires. Mais je me laisse aller à des propos trop libres et trop vifs, par l'ennui et le dégoût que me causent les moeurs publiques..."
Salluste, Guerre de Jugurtha
Pour en savoir plus :
Les Oeuvres complètes de SALLUSTE :
http://remacle.org/bloodwolf/historiens/salluste/intro.htm
L'affaire Catilina : sur un ton journalistique, la passionnante chronique de l'affaire comme un fait d'actualité, par une classe de... 6èmes !
http://pot-pourri.fltr.ucl.ac.be/itinera/travaux/aff_cat/aff_cat_default.htm#anc01
La guerre avec Jugurtha, au Maghreb (aspect archéologique et géographique) :
http://www.jugurtha.com/page4.html -
Réflexions caduques
[note supprimée]